Henri Montan BERTON
Henri Montan Berton, gravure d'Edme Quenedey d'après le physionotrace
Henri Montan BERTON
compositeur et violoniste français
(Paris, baptisé le 18 septembre 1766 – 40 rue Richer, Paris ancien 2e, 22 avril 1844*)
Fils de Pierre Montan BERTON, compositeur, et d'Anne Marthe Perrot DUREBECQ.
Epouse le 23 octobre 1792 Marguerite Geneviève FILLIEUX DE RONCIÈRES (Vineuil-Saint-Firmin, Oise, v. 1767 – Paris ancien 9e, 11 janvier 1852).
De sa liaison avec Marie-Thérèse DAVOUX dite Mlle MAILLARD (Paris ancien 5e, 06 janvier 1766 – Montmorency, Seine-et-Oise [auj. Val-d'Oise], 16 octobre 1818), cantatrice de l'Opéra, naquit Henri François BERTON, compositeur.
Il entra d'abord comme violon à l'orchestre de l'Opéra, où le chef d'orchestre, Rey, lui donna ses premières leçons de composition ; après quoi, il devint élève du célèbre Sacchini. Il avait dix-neuf ans lorsque, en 1786, il fit entendre au Concert spirituel un oratorio, et dès l’année suivante il donnait à la Comédie-Italienne deux opéras-comiques : les Promesses de mariage et l'Amant à l'épreuve. Sa longue carrière de compositeur dramatique ne comprend pas moins de quarante-six ouvrages, représentés tant à l'Opéra qu'à la Comédie-Italienne et à l'Opéra-Comique, parmi lesquels sept ont été écrits en société avec d'autres artistes. Plusieurs de ces ouvrages ont mérité et obtenu des succès retentissants, et placent Berton au premier rang des musiciens qui font honneur à la scène française. Il faut surtout citer parmi eux : Aline, reine de Golconde (1803) ; le Délire (1799) ; Montano et Stéphanie (1799) ; les Rigueurs du cloître (1790), puis le Grand deuil (1801) ; la Romance (1804) ; les Maris garçons (1806) ; Françoise de Foix (1809) ; le Charme de la voix (1811) ; Ninon chez Madame de Sévigné (1808) ; les Deux Mousquetaires (1824) ; etc. Il a fait des modifications et arrangements pour la reprise d'Echo et Narcisse de Gluck à l'Opéra le 25 mars 1806, et pour la reprise de Guillaume Tell de Grétry à l'Opéra-Comique le 24 mai 1828. Il a écrit des oratorios, cantates et ballets, un Traité d’harmonie (1814), De la musique mécanique et de la musique philosophique (1826), suivi d’une Epître à un célèbre compositeur (1829). On lui doit aussi un Mémoire sur la construction des instruments à cordes et à archet (1819).
Comme compositeur, Berton avait de l'ampleur, un rare sentiment dramatique, et sa musique a un caractère d'individualité si prononcé qu'elle ne laisse jamais de doute sur le nom de son auteur. En dehors de ses œuvres dramatiques, cet artiste a écrit des oratorios et plusieurs grandes cantates scéniques. Il s'est fait connaître aussi comme écrivain sur la musique par divers travaux intéressants. Berton fut chef d'orchestre à l'Opéra italien (1807-1809), chef de chant à l'Opéra (1809), professeur d'harmonie au Conservatoire de Paris (09 novembre 1795), puis de composition (01 janvier 1818), et membre de l'Académie des Beaux-arts, où il fut nommé le 03 juin 1815.
En 1815, il habitait 16 rue Vivienne à Paris. Il est décédé en 1844 à soixante-dix-sept ans. Il est enterré au Père-Lachaise (13e division).
œuvres lyriques
Absalon, oratorio (Concert spirituel, 1786) le Premier navigateur, opéra en 1 acte, livret de N.-F. Guillard, inédit (1786) Jephté, oratorio (Concert spirituel, entre 1786 et 1791) David dans le Temple, oratorio (Concert spirituel, entre 1786 et 1791) les Bergers de Bethléem, oratorio (Concert spirituel, entre 1786 et 1791) la Gloire de Syon, oratorio (Concert spirituel, entre 1786 et 1791) Marie de Seymours, cantate (Concert spirituel, entre 1786 et 1791) Orphée dans les bois, cantate (Concert spirituel, entre 1786 et 1791) les Promesses de mariage ou la Suite de l'Épreuve villageoise, opéra bouffon en 2 actes, livret de Pierre-Jean-Baptiste Desforges (Opéra-Comique, 04 juillet 1787) => partition l'Amant à l'épreuve ou la Dame invisible, opéra-comique en 2 actes, livret de Pierre-Louis Moline et Claude-François Fillette-Loraux (Opéra-Comique, 05 décembre 1787) les Arts et l'amitié, comédie en 1 acte d’Armand de Bouchard, musique avec Martini et Jean-Pierre Solié (Opéra-Comique, 05 août 1788) Cora, opéra en 3 actes, livret de Delatouloubre (Opéra, répétition générale, juillet 1789) les Brouilleries, comédie en 3 actes, mêlée d'ariettes, livret de Charles-Joseph Loeillard d'Avrigny (Opéra-Comique, 01 mars 1790) les Rigueurs du cloître, drame lyrique en 2 actes, livret de Joseph Fiévée (Opéra-Comique, 23 août 1790) => partition livret le Nouveau d'Assas, trait civique en 1 acte mêlé de chants, livret de Jean-Elie Dejaure (Opéra-Comique, 15 octobre 1790) => partition les Deux sentinelles, comédie en 1 acte, mêlée d'ariettes, livret de François Andrieux (Opéra-Comique, 27 mars 1791) les Deux sous-lieutenants ou le Concert interrompu, comédie en 1 acte d’Etienne Guillaume François de Favières (Opéra-Comique, 19 mai 1792) Eugène ou la Piété filiale, opéra en 3 actes, livret de Charles-Joseph Loeillard d'Avrigny (Théâtre Feydeau, 11 mars 1793) le Congrès des Rois, comédie en 3 actes, livret d’Antoine-François Eve, musique avec Blasius, Cherubini, Dalayrac, Deshayes, Devienne, Grétry, Jadin, Kreutzer, Méhul, Solié et Trial fils (Opéra-Comique, 26 février 1794) Agricol Viala ou le Héros de la Durance, opéra-comique en 1 acte, livret de Claude-François Fillette-Loraux (Théâtre Feydeau, 09 octobre 1794) Bélisaire, comédie héroïque en 3 actes, livret d’Auguste-Louis Bertin d’Antilly, musique de Philidor (actes I et II) terminée par Henri Montan Berton (acte III) (Opéra-Comique, 03 octobre 1796) Christophe et Jérôme ou la Ferme hospitalière, opéra-comique en 1 acte, livret d’Etienne Guillaume François de Favières (Opéra-Comique, 26 octobre 1796) Tyrtée, opéra en 2 actes, livret de Gabriel Marie Legouvé, répété généralement à l'Opéra mais non représenté Ponce de Léon, opéra bouffon en 3 actes, livret et musique d’Henri Montan Berton (Opéra-Comique, 15 mars 1797) => livret le Dénouement inattendu, opéra-comique en 1 acte, livret de Joigny (Opéra-Comique, 10 novembre 1797) le Rendez-vous supposé ou le Souper de famille, comédie en 2 actes mêlée d'ariettes, livret de Jean-Baptiste Pujoulx (Opéra-Comique, 05 août 1798) => livret Montano et Stéphanie, opéra en 3 actes, livret de Jean-Elie Dejaure (Opéra-Comique, 15 avril 1799) => fiche technique la Nouvelle au camp de l'assassinat des ministres français à Rastadt ou le Cri de vengeance, scène patriotique en 1 acte (Opéra, 14 juin 1799) l'Amour bizarre ou les Projets dérangés, opéra-comique en 1 acte, livret de Charles-Louis Lesur (Opéra-Comique, 30 août 1799) le Délire ou les Suites d'une erreur, comédie en 1 acte mêlée d'ariettes, livret de Révéroni Saint-Cyr (Opéra-Comique, 07 décembre 1799) le Grand deuil, opéra-bouffon en 1 acte, livret de Jean-Baptiste-Charles Vial et Charles-Guillaume Etienne (Opéra-Comique, 21 janvier 1801) => partition livret le Concert interrompu, opéra-comique en 1 acte, livret de Benoît-Joseph Marsollier et Etienne Guillaume François de Favières (Opéra-Comique, 31 mai 1802) => partition livret Aline, reine de Golconde, opéra-comique en 3 actes, livret de Jean-Baptiste-Charles Vial et Etienne Guillaume François de Favières (Opéra-Comique, 03 septembre 1803) => fiche technique le Retour de Thésée, grande cantate, paroles de De Jouy (1803), exécutée à Bruxelles en présence de Napoléon la Romance, opéra-comique en 1 acte, livret de Claude-François Fillette-Loraux (Opéra-Comique, 26 janvier 1804) => partition livret Trasibule, cantate scénique, paroles d'A. L. Beaunier (Hôtel de Ville, 16 décembre 1804) => livret le Vaisseau Amiral ou Forbin et Delville, opéra en 1 acte, livret de Révéroni Saint-Cyr (Opéra-Comique, 02 avril 1805) => partition livret Délia et Verdikan, opéra-comique en 1 acte, livret de Jean-Baptiste Elleviou (Opéra-Comique, 09 mai 1805) les Maris garçons, opéra-comique en 1 acte, livret de P. Charles Gaugiran-Nanteuil (Opéra-Comique, 14 juillet 1806) => partition le Chant du retour, cantate, paroles de De Grandmaison (1806) le Chant du retour, cantate, paroles d’A. Louis Beaunier (Opéra-Comique, 27 juillet 1807) le Chevalier de Sénanges ou Une porte ouverte et fermée, opéra en 3 actes, livret de Joseph-Alexandre de Ségur et Auguste de Forbin (Opéra-Comique, 23 juillet 1808) Ninon chez Madame de Sévigné, comédie en 1 acte mêlée de chants, livret d’Emmanuel Dupaty (Opéra-Comique, 26 septembre 1808) => fiche technique Charles II, opéra, livret de Gabriel Marie Legouvé et Mme Dufrenoy (édité avant 1809) Françoise de Foix, opéra-comique en 3 actes, livret de Jean-Nicolas Bouilly et Emmanuel Dupaty (Opéra-Comique, 28 janvier 1809) => fiche technique l'Enlèvement des Sabines, ballet-pantomime historique en 3 actes, livret de Louis Jacques Milon (Fontainebleau, 04 novembre 1810 ; Opéra, 25 juin 1811) le Charme de la voix, opéra-comique en 1 acte, livret de Charles Gaugiran-Nanteuil (Opéra-Comique, 24 janvier 1811) => livret la Victime des Arts ou la Fête de famille, opéra-comique en 2 actes, livret de Louis-Marie d'Estourmel, musique avec Niccolo Isouard et Jean-Pierre Solié (Opéra-Comique, 27 février 1811) l'Enfant prodigue, ballet-pantomime en 3 actes, livret de Pierre Gardel (Opéra, 28 avril 1812) le Laboureur chinois, opéra en 1 acte, livret de J. M. Deschamps, Jean-Baptiste Després et Etienne Morel de Chédeville, musique tirée d'Haydn et de Mozart (Opéra, 05 février 1813) Valentin ou le Paysan romanesque, opéra-comique en 3 actes, livret de Louis-Benoît Picard et Claude-François Fillette-Loraux (Opéra-Comique, 13 septembre 1813) => partition l'Oriflamme, opéra en 1 acte, livret d'Etienne et Baour-Lormian, musique avec Méhul, Paer et Rodolphe Kreutzer (Opéra, 01 février 1814) l'Heureux retour, ballet en 1 acte, livret de Louis Milon, musique arrangée avec Louis Luc Loiseau de Persuis et Rodolphe Kreutzer (Opéra, 25 juillet 1815) les Dieux rivaux ou les Fêtes de Cythère, opéra-ballet en 1 acte, livret de Dieulafoy et Briffaut, musique avec Spontini, Persuis et Rodolphe Kreutzer (Opéra, 21 juin 1816) => livret Féodor ou le Batelier du Don, opéra-comique en un acte, livret de Claparède (Opéra-Comique, 15 octobre 1816) Roger de Sicile ou le Roi troubadour, opéra en 3 actes, livret de Jean-Henri Guy (Opéra, 04 mars 1817) => partition livret Corisandre ou la Rose magique, opéra-féerie en 3 actes, livret de François Ancelot et Xavier Saintine (Opéra-Comique, 29 juillet 1820) Blanche de Provence ou la Cour des Fées, opéra en 3 actes, livret de Léon Théaulon de Lambert et De Rancé, musique avec Boieldieu, Cherubini, Kreutzer et Paer (Cour, 01 mai 1821 ; Opéra, 03 mai 1821) Virginie ou les Décemvirs, tragédie lyrique en 3 actes, livret de Désaugiers aîné (Opéra, 11 juin 1823) => partition les Deux Mousquetaires ou la Robe de chambre, opéra-comique en 1 acte, livret de Jean-Baptiste Vial et Justin Gensoul (Opéra-Comique, 22 décembre 1824) => fiche technique la Mère et la Fille ou Vingt ans de constance, opéra-comique en 3 actes, livret d'Emmanuel Dupaty (1824), affiché à l'Opéra-Comique et non représenté Pharamond, opéra en 3 actes, livret de François Ancelot, Pierre-François-Félix Guiraud et Alexandre Soumet, musique avec Rodolphe Kreutzer et Boieldieu (Opéra, 10 juin 1825) les Créoles, drame lyrique en 3 actes, livret de Louis Lacour (Opéra-Comique, 14 octobre 1826) les Petits appartements, opéra-comique en 1 acte, livret d’Henri Dupin et Antoine-François Varner (Opéra-Comique, 09 juillet 1827) => fiche technique la Marquise de Brinvilliers, drame lyrique en 3 actes, livret de Castil-Blaze et Eugène Scribe, musique avec Auber, Batton, Blangini, Boieldieu, Carafa, Luigi Cherubini, Herold et Paer (Opéra-Comique, 31 octobre 1831) |
Il commença ses études musicales dès l'âge de six ans. A la mort de son père, il fut admis en qualité de surnuméraire au nombre des violons de l'orchestre de l'Opéra, et, un an après, comme titulaire. Rey, son professeur de composition, méconnut les rares dispositions de Berton, qui montrait déjà cependant un impérieux désir d'apprendre les règles de l'art auquel il a dû sa gloire. Négligé par son maître, il étudia la partition de la Frascatana, de Paisiello, essayant de surprendre les secrets du génie dans une de ses plus heureuses manifestations. Berton écrivit bientôt la musique d'un petit opéra, intitulé la Dame invisible. L'oreille ravie est bien près du cœur, ainsi que l'a fait observer Scribe dans son livret de l'Ambassadrice. Or Mlle Maillard, célèbre cantatrice de l'Opéra, et qui avait des bontés pour le futur maestro, écouta de cette oreille-là la partition de la Dame invisible. Charmée de l'œuvre de son protégé, elle porta la pièce à Sacchini qui, devinant l'avenir réservé au jeune compositeur, l'invita a venir travailler chez lui. Dès ce moment, les progrès de Berton furent rapides, et il composa des oratorios et des cantates, exécutés avec succès au concert spirituel. Son premier opéra : les Promesses de mariage, représenté à la Comédie-Italienne, en 1787, ne dépasse guère les bornes d'une honnête médiocrité, mais les Rigueurs du cloître (1790) annoncent déjà un véritable talent. Montano et Stéphanie, opéra joué en 1799 à l'Opéra-Comique, est un véritable chef-d'œuvre et l'un des ouvrages les plus remarquables qui aient paru sur la scène française depuis le mouvement musical opéré dans les dernières années du XVIIIe siècle. On a fait de nombreuses reprises de cet opéra, qui marque la place de son auteur parmi les premiers compositeurs français. Berton fit partie du Conservatoire dès sa formation (1795), comme professeur d'harmonie. En 1807, il prit la direction de l'Opéra italien, et, en 1809, il devint chef du chant à l'Opéra. Admis à l'Institut par ordonnance (1815), il fut fait à la même époque chevalier de la Légion d'honneur ; ce ne fut qu'en 1838 qu'il reçut le grade d'officier, lors de la réorganisation du Conservatoire sous le nom d'École royale de musique et de déclamation. Berton y fut appelé comme professeur de composition et membre du jury d'examen. Il était aussi décoré de plusieurs ordres étrangers. Ses nombreux élèves ont, pour la plupart, brillé dans leur art, ce qui prouve que le talent du professeur égalait celui du compositeur. Voici la liste des travaux les plus remarquables de Berton : Système général d'harmonie, composé d'un arbre généalogique des accords, d'un traité d'harmonie basé sur l'arbre généalogique et d'un dictionnaire des accords (Paris, 1815, 4 vol. in-8°). « Dans ce système, dit M. Fétis, Berton écarte la loi de l'analogie des accords par la similitude de leurs fonctions, et, n'admettant que la considération du renversement, fait autant d'accords fondamentaux qu'il y a d'accords directs, théorie dont le moindre défaut est de multiplier sans nécessité les termes techniques d'une nomenclature embarrassante. Qu'on imagine ce que c'est qu'un dictionnaire d'accords renfermé dans plusieurs centaines de pages in-4°. » M. Fétis a parfaitement raison, et tous les musiciens seront de son avis ; De la musique mécanique et de la musique philosophique (Paris, 1822, broch. in-8°). C'était une critique injuste de Rossini et de sa musique. Berton, dont le style musical était généralement pur et l'harmonie correcte, avait toujours eu, même à l'époque de ses triomphes, plus de science que d'imagination. Devenu vieux, il ne comprit pas la révolution musicale que venait opérer Rossini ; Berton ne vit, dans l'illustre maître italien qu'un rival redoutable qui excita sa haine ; Épître à un célèbre compositeur français, précédée de réflexions sur la musique mécanique et la musique philosophique (Paris, 1829, in-8°). Le célèbre compositeur était Boieldieu, qui ne fut nullement flatté de la dédicace d'un factum entièrement opposé à ses opinions. Berton a donné aussi des articles de musique insérés dans le journal l'Abeille et dans l'Encyclopédie Courtin. On lui doit également divers rapports lus à l'Institut et la définition des termes de musique de la dernière édition du Dictionnaire de l'Académie française. M. Raoul Rochette a publié, en 1844, une notice historique sur la vie et les ouvrages de Berton. Voici la liste des œuvres musicales de ce célèbre compositeur : l'Amant à l'épreuve, opéra-comique en deux actes et en prose, paroles de Moline et de Loraux (5 décembre 1787). C'est l'ouvrage cité plus haut sous le titre de la Dame invisible ; les Rigueurs du cloître, opéra-comique en deux actes, paroles de Fiévée (Comédie-Italienne, 22 août 1790). L'héroïne de la pièce est une jeune fille vouée aux vœux monastiques par des haines jalouses. « Il va sans dire, raconte M. Thurner, qu'une intrigue amoureuse se noue au milieu du réseau inquisitorial qui entoure Lucile ; celle-ci trahit son amour par le trouble que lui cause la lecture imposée d'une lettre de son amant. Elle est condamnée à la peine du cachot, quand survient celui qu'elle aime ; il jure de se venger et reparaît bientôt avec un bataillon de la garde nationale. L'officier civique déclare que désormais, sous le régime de la liberté et des lois, la contrainte morale est abolie. L'ouvrage se termine par un chœur remarquable :
O liberté ! déesse de la France, Plutôt mourir que de vivre sans toi !
La partition de Berton se distingue par une vigoureuse entente des ensembles. La grande scène où les religieuses assemblées, pleines d'une sainte indignation, découvrent la coupable ; l'arrivée du jeune comte, implorant la grâce de Lucile, la colère croissante des supérieures, forment une belle gradation dramatique. L'entrée des religieuses sur ces mots :
Quel scandale abominable !
reproduit heureusement par son rythme syllabique et saccadé les caquetages féminins. Le rythme se poursuit à travers différents méandres harmoniques, mais au-dessus se détache une phrase dite par les jeunes religieuses. Elles soupirent quelques mots dont les tenues planent claires et limpides au-dessus du bruissement bilieux des vieilles. L'arrivée du jeune homme, sa sortie, l'effroi, le tumulte, l'indignation des unes, la compassion des autres, tout cela réuni compose une page pleine d'intérêt. » Le succès de cet opéra fut très grand à Paris et dans les provinces ; le Nouveau d'Assas, opéra-comique en un acte et en prose, paroles de Dejaure (15 octobre 1790), pièce qui célébrait l'héroïque dévouement de Désile ; les Deux Sentinelles, opéra-comique en un acte, paroles de Favières et Andrieux (27 mars 1791) ; les Deux Sous-lieutenants, opéra-comique en un acte et en prose, de Marsollier et Favières (19 mai 1792), repris le 30 mai 1802, sous le titre du Concert interrompu ; Viala ou le Héros de la Durance, drame historique en un acte, mêlé d'ariettes, paroles de Fillette-Loraux (9 octobre 1794) ; Ponce de Léon, opéra-comique en trois actes et en prose, paroles et musique de Berton (15 mars 1797). Le poème n'était pas plus mauvais que ceux des paroliers ordinaires du théâtre Favart ; mais la partition, moins inspirée que savante, fut accueillie avec froideur ; le Rendez-vous supposé ou le Souper de famille, opéra-comique en deux actes et en prose, paroles de Pujoulx (5 août 1798). C'est la comédie des Dangers de l'absence, arrangée en libretto ; le Dénouement inattendu, opéra en un acte (1798). M. Fetis, fort mal renseigné en général sur les titres des opéras de Berton et sur la date exacte de leur représentation, mentionne seul, dit-il, cet ouvrage. Il attribue aussi au compositeur l'opéra de Cora, dont la musique est de Méhul ; Montano et Stéphanie, drame lyrique en trois actes et en prose, paroles de Dejaure (15 avril 1799). « Berton, raconte M. Edouard Monnais, habitait une mansarde ornée du plus simple mobilier, lorsque se présenta chez lui un parolier célèbre alors, déjà son collaborateur dans le Nouveau d'Assas. C'était le poète Dejaure. Il apportait à Berton le libretto de Montano et Stéphanie, reçu au théâtre Favart et qu'il avait présenté d'abord à Grétry ; mais celui-ci ne voulait plus composer et lui avait répondu : « II vous faut un musicien qui soit encore dans l'âge des passions, et qui, néanmoins, ait fait ses preuves au théâtre. Celui qui réunit toutes ces conditions, c'est le petit Berton. Croyez-moi, choisissez-le, et il vous rendra un chef-d'œuvre. » Cette prédiction se réalisa : Berton s'éprit pour le sujet qu'il avait à traiter, et sa partition fut achevée en un mois. Berton raconte lui-même de quelle manière originale il composa l'opéra qui devait immortaliser son nom. « J'avais cinq rôles principaux à faire agir et parler. Je fis donc choix de cinq gros bouchons : à la gauche du spectateur, le premier était Stéphanie ; le deuxième, Léonati ; le troisième, Salvator ; le quatrième, Montano, et le cinquième Altamont. Les petits bouchons placés derrière représentaient les officiers et les gens de leur suite : cette statistique exacte du tableau que je désirais que la scène offrît me fut d'un grand secours ; car, en faisant avancer ou reculer à mon gré l'un de ces personnages, lorsque l'un d'eux me paraissait avoir trop tardé à parler, je m'identifiais plus directement avec l'intérêt et le pathétique éminent de cette belle situation dramatique. » – « La première représentation de Montano et Stéphanie, dit M. Méneau, obtint un immense succès, malgré le tumulte affreux qui eut lieu lorsque l'on vit entrer en scène le chanteur Solié sous des habits de prêtre ; le vacarme de quelques derniers jacobins étouffa la voix de Gavaudan, qui jouait le rôle de Montano, et celle de Mlle Jenny Bouvier, chargée du personnage de Stéphanie. » A l'issue de la représentation, un énergumène alla dénoncer Berton, qui fut mandé chez le chef de la police. On l'accusait de chouannerie pour avoir mis en scène un prêtre honnête homme. « Mais, citoyen, répondit le compositeur au juge irrité, je croyais que la musique... – C'est justement en ce point que tu es coupable, répondit le farouche employé, car tout ce que chante ton cafard est excellent, et, sans la force de mes sentiments républicains, je me serais laissé toucher par tes accords aristocratiques... Va, jette ton ouvrage au feu, et sois heureux d'en être quitte à si bon marché. » Berton n'eut garde de suivre le conseil ; mais sa pièce fut interdite après la troisième représentation, « parce que, observait un critique du temps, elle exigeait la présence de personnages qui blessaient la susceptibilité des oreilles et des yeux républicains. » L'opéra de Montano et Stéphanie reparut en 1801, et, à cette occasion, Legouvé fit au troisième acte des modifications regardées comme nécessaires. M. Thurner a jugé le chef-d'œuvre de Berton avec une vérité qui nous engage à mettre son article sous les yeux des dilettantes. « L'action se passe au IIe siècle, à Syracuse. Un vaillant et noble chevalier doit s'unir avec Stéphanie ; un sien ami, Altamont, jaloux ténébreux, son rival en un mot, à la faveur d'une nuit obscure, imagine un stratagème pour détruire les illusions d'amour de Montano. Un valet et une suivante déguisés se rencontrent à un rendez-vous ; Montano se livre à des transports furieux, et quand la cérémonie nuptiale se prépare, il jette l'insulte à la face de celle qu'il aime. C'est là que se trouve la progression célèbre qui aboutit à ce crescendo si renommé. L'effet est splendide, parce que, d'un seul jet, le compositeur remue tous les personnages de cette scène ; avec une véhémence croissante, il agite successivement la douleur du père, il peint la stupeur du prêtre, l'indignation de la fiancée et son accablement, la perfidie d'Altamont et les malédictions de la foule. Ce finale est grand par la pensée, grand par l'exécution. Quant aux autres morceaux, quoique d'un ordre inférieur, ils sont également remarquables. Quoi de plus suavement mélodique que l'air d'entrée de Stéphanie :
Oui, c'est demain que l'hyménée,
qui, de ternaire, se transforme en une mesure binaire, faisant déjà pressentir les orages de l'acte suivant... Remarquons aussi le chœur :
Avançons en silence
avec sa mesure rythmique en triolets et en notes jetées dans les basses. Il y a quelques intentions de musique imitative dans cette scène ; quand l'imitation réside dans le sentiment, quand l'âme colore ses impressions, alors la musique imitative est belle... ; mais, lorsque l'imitation se complaît dans la reproduction fictive des choses extérieures, elle est puérile ; aussi, quand Fabrice se glisse le long de la muraille, des traits de violons abandonnent les triolets et rampent dans leurs coulés en sourdine. Plus loin, l'ascension du valet sur le balcon de la belle est imitée par un passage parcourant une échelle de deux octaves à la tierce alternée : sol, si, la, do, etc. » C'est le cas de dire que
L'esprit qu'on veut avoir gâte celui qu'on a.
Il est étrange que les habiles directeurs de l'Opéra-Comique n'aient jamais songé à reprendre un des plus purs chefs-d'œuvre de l'art musical, alors qu'ils s'évertuent trop fréquemment à galvaniser de véritables cadavres. Citons encore : l'Amour bizarre, opéra-comique en un acte et en prose, paroles de Lesur (30 août 1799) ; le Délire ou les Suites d'une erreur, drame lyrique en un acte et en prose, paroles de Reveroni Saint-Cyr (6 décembre 1799), grand succès ; repris, en 1843, pour le début de M. Duvernoy ; le Grand Deuil, opéra-comique en un acte, paroles de Vial et d'Etienne (20 janvier 1801) ; Aline, reine de Golconde, opéra-comique en trois actes, paroles de Vial et Favières (30 septembre 1803), ouvrage charmant qui obtint les suffrages du monde entier. Il a été repris à l'Opéra national en 1848 ; la Romance, opéra-comique en un acte, de Loraux jeune et Lesur (24 janvier 1804) ; le Vaisseau amiral ou Forbin et Delville, opéra-comique en un acte, de Reveroni Saint-Cyr et Elleviou (1er avril 1805) ; Délia et Verdikan, opéra-comique en un acte et en prose, paroles d'Elleviou (8 mai 1805) ; les Maris garçons, opéra-comique en un acte, Gaugiran-Nanteuil (15 juillet 1806), charmante comédie musicale ; le Chevalier de Sénange, opéra-comique en trois actes, de Ségur jeune et du comte de Forbin-Janson (23 juillet 1808) ; Ninon chez madame de Sévigné, opéra-comique en un acte et en vers, de Dupaty (26 septembre 1808) ; Françoise de Foix, opéra-comique en trois actes, de Bouilly et Dupaty (28 janvier 1809), ouvrage remarquable ; la Victime des arts ou la Fête de famille, opéra-comique en deux actes, en collaboration avec Solié et Niccolo Isouard (27 février 1811) ; l'Enlèvement des Sabines, ballet en trois actes, de Milon (Opéra, 25 juin 1811) ; l'Enfant prodigue, ballet en trois actes, de Pierre Gardel (Opéra, 28 avril 1812) ; airs et récitatifs du Laboureur chinois, pastiche de J.-M. Deschamps , Després et Morel (Opéra, 5 février 1813) ; Valentin ou le Paysan romanesque, opéra-comique en deux, actes, de Picard et Loraux (13 septembre 1813) ; l'Oriflamme, opéra en un acte, en collaboration avec Méhul, Paer et Kreutzer, paroles de Baour-Lormian et Etienne (Opéra, 1er février 1814) ; l'Heureux Retour, ballet en un acte de Milon et Pierre Gardel, musique composée en collaboration avec Kreutzer et Persuis (25 juillet 1815) ; les Dieux Rivaux ou les Fêtes de Cythère, opéra-ballet en un acte, de Brifaut et Dieulafoy, musique en collaboration, avec Kreutzer, Persuis et Spontini (21 juin 1816) ; Féodor ou le Batelier du Don, opéra-comique en un acte, de Claparède (16 octobre 1816) ; Roger de Sicile ou le Troubadour, opéra en trois actes, de Guy (4 mars 1817) ; Corisandre ou la Rose magique, opéra-comique en trois actes, d'Ancelot et Xavier Saintine (29 juillet 1820) ; Blanche de Provence ou la Cour des Fées, opéra en trois actes, de Théaulon et de Rancé, musique faite en société avec Cherubini, Kreutzer, Paer et Boieldieu (3 mai 1821) ; Virginie, opéra en trois actes, de Désaugiers aîné (11 juin 1823) ; les Deux Mousquetaires ou la Robe de chambre, opéra-comique en un acte, de Vial et Justin Gensoul (22 décembre 1824) ; Pharamond, opéra en trois actes, d'Ancelot, Guiraud et Soumet, musique composée en collaboration avec Kreutzer et Boieldieu (10 juin 1825). Cet ouvrage fut écrit à la hâte, pour célébrer le sacre de Charles X ; les Créoles, drame lyrique en trois actes et en prose, de Lacour (14 octobre 1826). Berton, s'illusionnant sur ses moyens actuels, appelait les Créoles sa petite Dame Blanche. La chute à peine déguisée de son opéra fut un triste réveil pour le maestro qui, on doit le proclamer à sa louange, se montra un des admirateurs les plus enthousiastes du chef-d'œuvre de Boieldieu, représenté le 10 décembre 1825 ; les Petits appartements, opéra-comique en un acte, de MM. Imbert, Værner et Dupin (9 juillet 1827) ; cette pièce ne réussit pas. On doit encore à Berton plusieurs recueils de canons à trois et quatre voix, un grand nombre de romances, des oratorios, des cantates, etc.
(Pierre Larousse, Grand Dictionnaire universel du XIXe siècle, 1866-1876)
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Dès l'âge de six ans il apprit la musique ; à quinze, il entra comme violon à l'orchestre de l'Opéra. La première année (1782) il ne fut que surnuméraire ; mais un an après on l'admit comme titulaire. Son premier mettre de composition fut Rey, chef d'orchestre de l'Opéra, qui ne parut pas apercevoir les heureuses dispositions de son élève. Sacchini fut le deuxième ; non qu'il ait enseigné à Berton le mécanisme du contrepoint ou de l'harmonie ; mais il lui donna des conseils sur la disposition des idées mélodiques, sur la modulation et la conduite des morceaux de musique dramatique. Ce genre d'éducation dans l'art d'écrire, peut-être un peu superficiel, était le seul que le jeune compositeur pût recevoir ; car je ne croie pas qu'il y eût alors en France un seul homme, à l'exception de Gossec, qui eût des connaissances réelles dans la théorie du style scolastique, même il n'est pas certain que Gossec eût des idées nettes à cet égard. Quoi qu'il en soit, entraîné comme il l'était par un penchant irrésistible vers la musique du théâtre, Berton ne pouvait avoir de meilleur guide que Sacchini. Une partition, alors nouvelle, fixa son attention et devint son modèle dans l'art d'écrire : c'était la Frascatana de Paisiello ; il y pulsa le penchant à la simplicité qui est considéré comme un des caractères distinctifs de son talent. Animé du désir de se faire connaître, il parvint à se procurer un livret d'opéra dont le titre était la Dame invisible, et il en composa la musique. Mais à peine cet ouvrage fut-il achevé, qu'il éprouva l'inquiétude la plus vive sur le jugement qu'on en porterait. Une dame, qui connaissait Sacchini se chargea de lui mettre sous les yeux la partition du jeune musicien. L'artiste célèbre y ayant trouvé le germe du talent, demanda à voir l'auteur, le rassura contre ses craintes, et l'engagea à tenir travailler chez lui tous les jours. En 1786, Berton, âgé de dix-neuf ans, fit entendre ses premiers ouvrages au concert spirituel ; ils consistaient en oratorios ou cantates. L'année suivante il donna son premier opéra à la Comédie Italienne, sous le titre des Promesses de mariage : cette légère production fut favorablement accueillie. Plusieurs ouvrages succédèrent rapidement à ce premier essai, et confirmèrent les espérances qu'avait fait naître le talent de leur auteur ; mais le premier opéra où sa manière individuelle commença à se dessiner fut celui dont Fiévée lui fournit le livret, et qui avait pour titre les Rigueurs du cloître. On y remarqua particulièrement un chœur de nonnes, de l'effet le plus comique et le mieux senti. A l'époque où parut cet ouvrage, l'effervescence révolutionnaire imprimait aux arts une direction analogue aux idées énergiques du temps. Méhul, Cherubini venaient de faire entendre un genre de musique empreint de cette énergie, à laquelle la grâce était peut-être un peu trop sacrifiée. Il était difficile que Berton ne cherchât pas à satisfaire les besoins du moment dans ses compositions ; mais en suivant la route nouvelle, il ne se fit pas le copiste de ceux qui l'avaient tracée, et le développement de son individualité resta le constant objet de ses travaux. Ponce de Léon, dont il avait fait le livret et la musique, Montano et Stéphanie, et le Délire furent les œuvres principales de cette période de sa vie. Le Conservatoire de musique de Paris ayant été organisé en 1795, Berton y fut appelé comme professeur d'harmonie. Nommé en 1807 directeur de la musique de l'Opéra italien, qu'on appelait alors l'Opera buffa, il en remplit les fonctions jusqu'en 1809. Ce fut pendant sa direction qu'on entendit à Paris, pour la première fois, les Noces de Figaro, que Mozart avait écrites vingt ans auparavant. Ce chef-d’œuvre commença la réforme du goût de la musique en France, et fit comprendre à une population ignorante de l'art le charme que les richesses d'harmonie et d'instrumentation peuvent ajouter à de belles mélodies. A sa sortie du Théâtre italien, Berton obtint sa nomination de chef du chant de l'Opéra ; il garda cette place pendant que Picard dirigea l'Opéra, c'est-à-dire jusqu'à la fin de 1815. Au mois de juin de cette année, le nombre des membres de la section de musique de l'Institut ayant été porté à six, au lieu de trois, Berton fut désigné, avec Catel et Cherubini, pour compléter ce nombre. Peu de temps après, le roi le fit chevalier de la Légion d'honneur. La désorganisation du Conservatoire avait été la suite des revers de la France, en 1815 ; l'année suivante, l'intendance des Menus-Plaisirs du roi le rétablit sur de nouvelles bases, et Berton y fut appelé comme professeur de composition et comme membre du jury d'examen. En 1834 il fat fait officier de la Légion d'honneur. Il était aussi décoré de plusieurs ordres étrangers. L'instinct de la scène se fait remarquer dans toutes les bonnes productions de Berton ; cet instinct est un des traits distinctifs de son talent, complété par une certaine originalité de mélodie, d'harmonie, de modulation et d'instrumentation. La musique de cet artiste a un caractère d'individualité si prononcé, qu'elle ne laisse jamais de doute sur le nom de son auteur. Ce n'est pas cependant qu'elle n'offre qu'un type unique ; Montano et Stéphanie, le Délire, et Aline, présentent des variétés de systèmes très sensibles. Dans ces ouvrages, Berton a su colorer sa pensée de la manière la plus convenable aux situations. On voit un exemple fort remarquable de son heureuse facilité à cet égard dans l'opposition du style oriental dont le premier et le dernier acte d'Aline sont empreints, et de la fraîcheur provençale du second acte du même ouvrage. Malheureusement l'artiste à qui l'on doit ces estimables productions n'a pas toujours mis le même soin aux œuvres qui succédèrent aux opéras qui viennent d'elle nommés ; la négligence se fait apercevoir dans un grand nombre de ses ouvrages. D'ailleurs, lorsque vint le temps où l'imagination avait perdu son activité, Berton ne sut pas s'arrêter ; il continua d'écrire, accordant trop de confiance aux procédés de l'art et à l'expérience. C'est ainsi que ses derniers ouvrages n'offrent guère que des réminiscences affaiblies de se anciennes productions. Montano et Stéphanie est signalé depuis longtemps comme le chef-d’œuvre de cet artiste ; je crois qu'il n'y a pas moins de mérite dans le Délire et dans Aline, ouvrages écrits dans des genres différents. La liste de toutes les productions de Berton est fort étendue : [liste des cantates et œuvres lyriques] — Plusieurs recueils de canons à trois et à quatre voix. — Une grande quantité de romances. — Un système général d'harmonie, composé d'un Arbre généalogique des accords, d'un Traité d'harmonie basé sur l'Arbre généalogique, et d'un Dictionnaire des accords, Paris, 1815, 4 vol. in-4°. Dans ce système, Berton écarte la loi de l'analogie des accords par la similitude de leurs fonctions, et, n'admettant que la considération du renversement, fait autant d'accords fondamentaux qu'il y a d'accords directs ; théorie dont le moindre défaut est de multiplier sans nécessité les termes techniques d'une nomenclature embarrassante. Qu'on imagine ce que c'est qu'un dictionnaire d'accords renfermé dans plusieurs centaines de pages in-4°. Berton s'est fait connaître aussi comme écrivain par la rédaction des articles de musique du journal littéraire intitulé l'Abeille, et de plusieurs autres journaux. Il a publié aussi quelques brochures parmi lesquelles on a remarqué : De la musique mécanique et de la musique philosophique, Paris, 1822, 24 pages in-8°, écrit dirigé contre la vogue des opéras de Rossini ; et Epître à un célèbre compositeur français (Boieldieu), précédée de quelques observations sur la musique mécanique et sur la musique philosophique, Paris, Alexis Eymery, 1829, 48 pages in-8°. Les articles de musique de l'Encyclopédie publiée par Courtin ont été rédigés par Berton, à qui l'on doit aussi beaucoup de rapports sur divers objets relatifs à cet art, lus à l’Académie des Beaux-Arts de l'Institut ; enfin, il a été chargé de revoir les définitions des termes de musique de la dernière édition du Dictionnaire de l'Académie Française. Raoul-Rochette, secrétaire perpétuel de l’Académie des Beaux-Arts de l’Institut de France, a publié : Notice historique sur la vie et les ouvrages de M. Berton, Paris, 1844 in-4°. Henri Blanchard a donné aussi, dans ses Biographies de compositeurs, Henri-Montan Berton, Paris, 1839 in-8°.
(François-Joseph Fétis, Biographie universelle des musiciens, 1866)
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