Célestine DARCIER
Célestine Darcier dans l'acte III des Mousquetaires de la reine (Berthe de Simiane) lors de la création en 1846, dessin d'Alexandre Lacauchie (1847)
Célestine Hyacinthe DARCIER dite Célestine DARCIER
mezzo-soprano français
(Paris ancien 5e, 22 juin 1822* – Paris 1er, 12 mars 1870*)
Fille d’Adélaïde Augustine DARCIER (Paris, 1785 – Paris 18e, 10 avril 1869*), couturière [fille de Pierre Jean François DARCIER (– Paris, 20 septembre 1791)], et de père non dénommé.
Sa mère avait épousé Jean-François LEMAIRE, dont elle eut Pierre Jean Joseph LEMAIRE dit Joseph DARCIER (1819–1883), chanteur et compositeur.
Epouse à Paris ancien 2e le 19 août 1850* Jean André Edmond MARTY-MAMIGNARD (Paris ancien 4e, 06 juin 1812* – Paris 1er, 29 janvier 1880*), lieutenant-colonel, nommé chevalier de la Légion d’honneur le 11 août 1855.
Parents de Marie Jeanne Ernestine MARTY-MAMIGNARD (Saint-Gratien, Seine-et-Oise [auj. Val-d’Oise], 09 juin 1849* – Cannes, Alpes-Maritimes, 21 septembre 1928), épouse à Paris 1er le 16 juin 1868* Louis Alfred FIJAN (Paris ancien 2e, 30 juillet 1836* – Paris 1er, 15 juin 1914*), propriétaire [parents d’André FIJAN (1869–1958), compositeur].
Demi-sœur du chanteur et compositeur Joseph Darcier, elle fut une cantatrice de grand talent. Elle débuta en 1840 à l’Opéra-Comique où elle fit de nombreuses créations dont les Diamants de la couronne, Mina, les Mousquetaires de la reine, le Val d'Andorre, les Porcherons. Mariée en 1850, elle se retira de la scène après son mariage. Elle fit sa rentrée salle Favart le 03 février 1864 dans la Fille du régiment, mais y resta moins d’une année avant de faire ses adieux définitifs à la scène.
En 1850, elle habitait 13 rue Taitbout à Paris. Elle est décédée en 1870 à quarante-sept ans, en son domicile, 222 rue de Rivoli à Paris.
Sa carrière à l'Opéra-Comique
Elle y débuta le 21 mars 1840 dans la Mantille (Inez).
Elle y créa le 17 juin 1840 le Cent-Suisse (Louise) de Joseph Napoléon Ney ; le 02 septembre 1840 l’Automate de Vaucanson (Marie) de Luigi Bordèse ; le 12 octobre 1840 la Reine Jeanne (Pepa) d’Hippolyte Monpou et Luigi Bordèse ; le 06 mars 1841 les Diamants de la couronne (Diana) d’Esprit Auber ; le 02 juin 1841 l’Ingénue d’Hippolyte Colet ; le 26 juin 1841 les Deux voleurs de Narcisse Girard ; le 09 juin 1842 le Code noir (Zoé) de Louis Clapisson ; le 23 août 1842 le Conseil des Dix de Narcisse Girard ; le 13 octobre 1842 le Roi d’Yvetot (Jeanneton) d’Adolphe Adam ; le 02 novembre 1842 le Kiosque (Estrelle) de Jacques Féréol Mazas ; le 20 avril 1843 le Puits d'amour (le page Fulby) de Michael William Balfe ; le 14 septembre 1843 Lambert Simnel (Catherine Bred) d'Hippolyte Monpou et Adolphe Adam ; le 10 octobre 1843 Mina ou le Ménage à trois (Mina) d’Ambroise Thomas ; le 01 décembre 1843 l’Esclave du Camoëns (Griselda) de Friedrich von Flotow ; le 15 juillet 1844 les Quatre fils Aymon de Balfe ; le 03 février 1846 les Mousquetaires de la reine (Berthe de Simiane) de Fromental Halévy ; le 09 février 1848 la Nuit de Noël ou l'Anniversaire (Henriette) d’Henri Reber ; le 11 novembre 1848 le Val d'Andorre (Rose-de-Mai) de Fromental Halévy ; le 12 janvier 1850 les Porcherons (marquise de Bryane) d’Albert Grisar.
Elle y chanta le Déserteur (Tante Alexis) de Monsigny (reprise du 30 octobre 1843) ; Wallace ou le Ménestrel écossais (Alice) de Catel (reprise du 04 décembre 1844) ; Cendrillon de Niccolo Isouard (reprise du 25 janvier 1845) ; le Petit Chaperon rouge (Rose d’Amour) de François-Adrien Boieldieu (reprise) ; la Part du Diable (Casilda) ; la Fille du régiment ; le Déserteur (Jeannette) ; Jeannot et Colin (Colette). |
Célestine Darcier dans Lambert Simnel (Catherine Bred, actes II et III) lors de la création en 1843
Elle montra dès son enfance un goût inné pour le théâtre. Sa voix, un peu rauque à l'origine, s'assouplit par l'étude et la volonté. Mlle Darcier ne se momifia pas en devenant élève du Conservatoire, elle se contenta de suivre religieusement les conseils de Mme Bareither, son habile professeur. C'est, croyons-nous, la première fois qu'une femme a dirigé, seule, l'éducation d'une chanteuse devenue célèbre. Il est à regretter que le préjugé s'oppose encore à renouveler de pareilles épreuves, car le succès est là. Il doit paraître évident que certains secrets de l'art féminin ne peuvent être révélés que par des femmes intelligentes et expérimentées, qui en savent plus long à cet égard que tous ces messieurs du Conservatoire. Mlle Darcier débuta à l'Opéra-Comique, le 2l mars 1840, par le rôle d’Inez, dans la Mantille, opéra de Bordèse. Ce rôle avait été créé par Jenny Colon, ce qui n'empêcha pas la nouvelle venue d'y obtenir un charmant succès. Le public avait compris de prime abord l'avenir réservé à la jeune débutante ; il rassura par ses bravos la timide jeune fille, qui devint bientôt une de ses favorites. Mlle Darcier avait une figure plus intelligente que régulièrement belle ; sa tournure était distinguée, son geste sobre, mais éloquent. Elle chantait avec expression dirigeant à son gré un organe de contralto, déguisé en mezzo-soprano. Elle créa le rôle de Diana dans les Diamants de la couronne, avec un charme dont aucune des artistes qui lui ont succédé dans ce personnage ne peut donner l'idée. Dès lors sa place fut marquée au premier rang, et pendant dix ans elle marcha de triomphe en triomphe. En 1850, florissante de jeunesse, de beauté et de talent, elle renonça volontairement au théâtre, sûre de trouver dans le mariage un bonheur que l'envie et la calomnie s'efforçaient de lui arracher sur la scène. Voici la liste des principales créations de Mlle Darcier : Diana, des Diamants de la couronne ; Zoé, dans le Code noir, de Clapisson ; Estrelle, dans le Kiosque, de Mazas ; Casilda, dans la Part du diable, d'Auber ; le page Fulby, dans le Puits d'amour, de Balfe ; Catherine Bred, dans Lambert Simnel, d'Hippolyte Monpou et Adam ; Jeannette, à la reprise du Déserteur, de Monsigny ; Alice, dans Wallace, de Catel (reprise) ; Berthe de Simiane, dans les Mousquetaires de la reine, d'Halévy (un rôle délicieux de grâce, de finesse, de verve juvénile, type de la Dugazon du XIXe siècle : Mlle Darcier y était adorable) ; Henriette, dans la Nuit de Noël ou l'Anniversaire, opéra de Reber ; Rose-de-Mai, dans le Val d'Andorre, d'Halévy. Mlle Darcier se montrait admirable d'énergie et d'émotion dans ce rôle ; elle excitait des transports d'enthousiasme, lorsqu'elle chantait avec un art hors ligne :
Faudra-t-il donc pâle, éperdue, Mourir ici sous leur mépris ? Ah ! de l'amour qui m'a perdue Le déshonneur, hélas ! sera le prix. Quand le destin trop implacable Allait l'arracher de ces lieux, J'oubliai tout, je fus coupable, Et je dis : O mon Dieu ! je suis trop misérable ; Et j'ai commis le crime en détournant les yeux.
Elle chantait aussi à ravir la romance :
Marguerite, Qui m'invite A te conter mes amours,
air qui demandait des qualités en contraste complet avec le morceau précédent. Dans le rôle de Mme de Bryane, des Porcherons, de M. Albert Grisar, la tâche était différente : il s'agissait d'un rôle de chanteuse légère ; mais le talent de Mlle Darcier s'appelait légion : en sa qualité de véritable comédienne, elle passait à sa fantaisie du grave au léger, conservant toujours au même degré le don de plaire. On se rappelle encore le goût exquis avec lequel elle interprétait la romance :
L'amant qui vous implore, etc.
(Pierre Larousse, Grand Dictionnaire universel du XIXe siècle, 1872-1876)
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