Eugène ANTHIOME

 

Eugène Anthiome en 1880, photo Pierre Petit [BNF]

 

 

Eugène Jean Baptiste ANTHIOME dit Eugène ANTHIOME

 

compositeur français

(95 rue du Port, Lorient, Morbihan, 19 août 1836* – Godelin, Étables-sur-Mer, Côtes-du-Nord [auj. Côtes-d’Armor], 21 juillet 1916*)

 

Fils de Jean-Baptiste ANTHIOME (1814–1896), ténor, et d’Élisabeth Éloïse VERET.

Epouse à Paris 10e le 11 février 1868* Marie Adeline HAUTERIVE (Paris ancien 10e, 03 mars 1847 – Versailles, Seine-et-Oise [auj. Yvelines], 09 juin 1911).

Parents de Jeanne Henriette ANTHIOME (Ivry-sur-Seine, Seine [auj. Val-de-Marne], 22 juin 1869 – Versailles, 29 novembre 1955), qui a obtenu des récompenses au Conservatoire de Paris en solfège et en piano [épouse à Versailles le 31 mars 1891 Hilaire Paul BARRET DE BEAUPRÉ], et d’Edmond Charles ANTHIOME (Étretat, Seine-Inférieure [auj. Seine-Maritime], 05 septembre 1873 – Nice, Alpes-Maritimes, 19 juin 1948), artiste peintre.

 

 

Entré au Conservation de Paris, il devint élève de Carafa pour la fugue et la composition ; il y obtint en 1856 un 2e accessit d’harmonie, et en 1861 le 2e second grand prix de Rome avec la cantate Atala. On lui doit des œuvres vocales, instrumentales, et une méthode de piano. Il a fait représenter notamment, en 1866, aux Fantaisies-Parisiennes, un petit acte, Semer pour récolter ; un autre aux Folies-Bergère, le Dernier des Chippeways (6 février 1876), et, le 7 mars 1884, au théâtre du Château-d’Eau, Roman d’un jour, opéra-comique en trois actes, dont la chute fut complète. Il enseigna au Conservatoire de Paris : le 08 janvier 1863, il fut nommé répétiteur d’une classe d’étude du clavier, puis le 01 décembre 1888 il fut chargé de remplir les fonctions de professeur agrégé (il eut pour élève Maurice Ravel) ; il cessa ses fonctions le 01 janvier 1902.

En 1868, il habitait 28 rue Saint-Lazare à Paris 9e. Il est décédé en 1916 à soixante-dix-neuf ans, domicilié 20 rue des Marais à Versailles.

 

 

 

œuvres lyriques

 

Atala, cantate, paroles de Victor Roussy (prix de Rome, 1861)

la Naissance du Christ, oratorio

Semer pour récolter, opérette en 1 acte, livret d’A. di Pietro et C. Demeuse (Fantaisies-Parisiennes, 06 mai 1866 avec Mmes Costa-Rigault (Marceline), France (Pierrot) et M. Gustave Sujol (Jean Leblanc)) => partition

"C'est une assez fade paysannerie. Jean Leblanc, qui est riche, voudrait épouser Marcelline. Celle-ci lui préfère le jeune Pierrot, qui n'a rien. Quant à la musique, on y remarque le tic-tac du moulin, assez gentiment accompagné par l'orchestre, et d'assez bons couplets, chantés par Jean, sur Ce que c'est que l'amour." [Félix Clément, Dictionnaire des opéras, 1869]

les Noces de Prométhée, cantate (1867)

le Dernier des Chippeways, opérette en 1 acte (Folies-Bergère, 03 février 1876)

Don Juan marié ou la Leçon d’amour, opérette en 1 acte, livret d’H. Escoffier (Fantaisies-Parisiennes, 31 octobre 1878) => partition

Roman d’un jour, opéra-comique en 3 actes, livret de Michel Masson fils et Armand Lafrique (Opéra populaire de la rue de Malte (Théâtre du Château-d’Eau) le 07 mars 1884 avec Mmes Marie Vuillaume (Charlotte de Valois), Berthe Pasquier (Louison), Louise Roy (Suzette), Guffroy (Madame Claude), MM. Amédée Sujol (Olivier de Chavannes), Anthelme Guillot (le Prince de Modène), Emile Gruyer (Thomas), André David (Gervais), Davier (un Sergent du guet), sous la direction d’A. Lévy) => partition [voir critique ci-dessous]

Un Orage espagnol, opérette en 1 acte, livret de Collache (Casino d’Etretat, 31 août 1887)

Pongorillo, ballet en 1 acte

 

mélodies

 

A un ange, poème d’Alphonse Boeul (1893)

Berceuse, poème d’E. Tourneur (1868)

Chanson de grand-père, berceuse, poésie d’Eugène Anthiome (1911) => partition

Chanson de Nemorin, poème de Florian (1873)

Chansons d’Estelle, poème de Florian (1873)

Chant d’avril, poème d’Armand Lafrique (1903)

Coeur brisé, poésie d'Eugène Anthiome (1911) => partition

Si vous n’avez rien à me dire, poème de Victor Hugo (1903)

Six mélodies bretonnes, poèmes de Paul Barret (1900) : Vos binious les gas ; les Gas d’Islande ; Dors mon gas ; Hardi les gas ; Fileuse ; Carillon.

 

 

 

                   

 

Chant d'avril (par. Armand Lafrique / mus. Eugène Anthiome)

 

Si vous n'avez rien à me dire (par. Victor Hugo / mus. Eugène Anthiome)

 

 

 

 

Depuis le mois de novembre, je n'ai pas eu à parler sérieusement du Théâtre-Lyrique du Château-d'Eau, devenu Opéra-Populaire subventionné. A cette époque, on y donnait Roland à Roncevaux et l'on y promettait plus encore. La suite n'a pas été aussi brillante que le début. La Traviata est venue, puis le Brasseur de Preston, précédés du Trouvère, pâles épreuves tirées sur des planches déjà bien usées.

 

On s'attendait à mieux, et quelque sympathie que l'on ait eue pour un directeur jeune, hardi d'abord et assurément animé des meilleures intentions, on n'a pu s'empêcher de blâmer cette sorte d'engourdissement envahissant une entreprise dramatique, tout juste au moment où lui était accordée une assez belle subvention, encouragement autant que récompense de son activité.

 

Après d'assez longs délais, l'Opéra-Populaire a enfin renouvelé son affiche. Il a choisi une pièce en trois actes de MM. Michel Masson fils et Armand Lafrique, musique de M. Eugène Anthiome. Roman d'un jour, tel est le titre de cet ouvrage, qui semblait promis à de hautes destinées, à en juger par le temps et le soin que l'on a mis à le présenter au public.

 

Hélas ! en une soirée tout cela s'est évanoui. Et voilà comment, cette fois encore, je n'aurai pas à parler sérieusement de l'Opéra-Populaire.

 

Il a été impossible, en effet, de garder son sérieux devant l'œuvre nouvelle.

 

Elle n'est point sans analogie avec le Fantasio d'Alfred de Musset, et pourtant n'y ressemble pas le moins du monde. A des sujets de ce genre, il faut la liberté et la grâce du style ; la musique n'y a guère à faire autre chose que de petits couplets, dont la plupart du temps on se passerait bien.

 

Rien de lyrique, aucun germe réellement musical en pareille matière ; on est bien à autre chose qu'à la musique, — je parle toujours pour le cas où c'est un Musset qui tient la plume ; quand c'est M. Michel Masson fils et M. Lafrique, aucune illusion n'est permise : on voit la fable dans toute son indigente nudité, et l'on se demande comment un compositeur peut se monter la tête sur ces banales aventures.

 

Charlotte de Valois, fille du Régent, est promise au prince de Modène ; union officielle, dont la pensée n'empêche point le cœur de la jeune princesse de battre à sa fantaisie. Or, sa fantaisie la pousse en ce moment vers un gentil officier aux pages, Olivier de Chavannes, tout justement l'ami, le serviteur dévoué du prince.

 

Le trouvant endormi, elle cède à la tentation : elle effleure de ses lèvres le front d'Olivier. L'aveu est des plus francs. Pourtant Olivier ne prétend point tout d'abord en abuser. Il entend se consacrer au bonheur du prince : il arrange tout pour que Charlotte voie en lui un héros ; malheureusement, il arrange cela si mal que tout tourne à la confusion de l'héritier du trône de Modène, que tout concourt à attiser l'ardeur de la princesse pour le page.

 

Cet amour, ils finissent par se l'avouer, ce qui n'empêche pas le prince de reparaître au dénouement et de présenter la main à Charlotte de Valois, comme s'il allait l'épouser, — ce qui est bien, je crois, telle que l'entendent les auteurs, la fin de cette histoire. Olivier de Chavannes semble si heureux de ce dénouement, qu'il est permis de penser qu'il y trouve aussi son compte. Il a, du reste, passé jusque-là tout son temps à enfermer le prince dans des cabinets noirs et à lui rendre des services qui ressemblent fort à de mauvaises plaisanteries : il est présumable qu'il va continuer.

 

On s'est largement égayé de toutes ces situations, mais peut-être d'autre sorte qu'il ne l'eût fallu pour la pleine satisfaction des auteurs.

 

Je n'insisterai pas sur ces effets imprévus, j'en rendrai d'ailleurs M. Anthiome un peu comptable, bien qu'il en ait été aussi un peu victime.

 

Un compositeur de sa génération ne trouvera pas d'excuse pour justifier le choix de thèmes pareils à ceux qui fourmillent dans Roman d'un jour, et qu'il a mis en musique avec une bonne foi et une conviction dont il n'est pas permis de douter.

 

Comment un musicien de sérieuse valeur, professeur au Conservatoire et, en cette qualité, au courant du mouvement artistique de son époque, a-t-il pu s'attarder à ce point dans le chemin battu et rebattu de l'opéra-comique le plus poncif ?

 

Posons ce problème sans le résoudre ; voyons seulement ce que M. Anthiome a fait musicalement pour ce Roman d'un jour, qui a bien failli justifier le titre d'un vieil ouvrage fort connu et n'être que le Roman d'une heure, grâce aux étranges disparitions et réapparitions du prince de Modène, et à l'affolement qui paraissait s'être emparé des artistes, en présence d'une salle en trop belle humeur.

 

L'ouverture, que traverse une fanfare de chasse, est une page d'importance ; ce n'est point une page de valeur. Elle est sans doute d'un homme qui sait bien ce qu'il veut dire et le dit de son mieux, mais dans un langage sans relief.

 

Un chœur à distance sert d'introduction au premier acte. C'est une marche nocturne, assez bien rythmée et qui va decrescendo pour se perdre tout à fait dans l'éloignement, au moment où Olivier, éclairant la route du prince de Modène, escalade le mur du parc de la princesse de Valois.

 

Les chœurs de ce genre, et sur ce motif, chantent dans toutes les mémoires. En le plaçant au début de son ouvrage, M. Anthiome semblait nous prévenir honnêtement que nous n'avions aucune surprise à attendre de lui. Nous n'en avons eu aucune, en effet, surtout dans ce premier acte, où romance, couplets et cavatine se suivent et se ressemblent étrangement.

 

Les deux autres actes ont eu une fortune meilleure ; on a applaudi dans l'un des couplets satiriques d'un tour assez heureux ; dans l'autre, une romance du ténor : « Elle était émue et tremblante ! » et un air de la chanteuse : « Enfin me voilà, seule ! » On a même bissé ces deux numéros et on l'a fait avec l'empressement de gens qui ne demandent pas mieux que de donner le témoignage de dispositions favorables dont jusqu'alors il leur a été impossible de trouver l'emploi. Un duo terminant l'ouvrage a été également souligné de vifs applaudissements.

 

Tel est le bilan bien sec de cette soirée, qui ne comptera point pour grand'chose à l'actif de l'Opéra-Populaire. L'œuvre de M. Anthiome était chantée par la « petite troupe », le Roman d'un jour étant évidemment destiné à faire les « lendemains » des grands ouvrages lyriques.

 

Petite troupe, petites voix ; jeunes talents, parmi lesquels on a distingué Mlle Marie Vuillaume, qui a beaucoup de gentillesse et de charme et joue avec une agréable ingénuité le rôle de Charlotte de Valois ; ainsi que M. Sujol, ténorino aimable, comédien encore inexpérimenté, chargé de celui d'Olivier.

 

La direction de l'Opéra-Populaire a très bien monté cet ouvrage, le premier de son répertoire de théâtre subventionné. Les costumes sont frais et jolis. Le décor du second acte est charmant, avec ses grands arbres s'enlevant légèrement sur un ciel clair, ses toits d'ardoise et ses pavillons à vieux balustres Louis XIII.

 

L'orchestre et les chœurs, si justement remarqués dès la réouverture de ce théâtre, sont toujours excellents et excellemment menés par M. A. Lévy.

 

(Louis Gallet, la Nouvelle Revue, 15 mars 1884)

 

 

 

 

 

Né à Lorient le 19 août 1836. Fils de J.-B. Anthiome, qui fût l'un des premiers chanteurs de son époque. Il commença ses études musicales à Bordeaux en 1842 et montra déjà de grandes aptitudes ; après avoir beaucoup voyagé avec son père, il entre à la pension Hortus pour y terminer ses études et, en 1853, débute en public dans un concert à Rouen où il exécute de ses compositions ; il entre ensuite au Conservatoire dans une classe d'harmonie où il obtint un accessit.

Nommé accompagnateur d'une classe d'opéra-comique, il remplit ces fonctions pendant cinq ans et les résigne pour préparer le concours de Rome dans la classe de Carafa ; en 1861, il obtient à son premier concours le second grand prix de Rome.

Eugène Anthiome a eu un opéra-comique en un acte, Semer pour récolter, joué à l'Athénée ; Don Juan marié, en collaboration avec Escoffier (théâtre Beaumarchais) ; une opérette aux Folies-Bergère, le Dernier des Chippenvays ; un ballet au Shaking-Théâtre ; un opéra-comique en trois actes au Théâtre-Lyrique, le Roman d'un jour. En outre, E. Anthiome a publié une centaine de morceaux de piano, une quarantaine de mélodies pour chant, des morceaux pour divers instruments : violon, violoncelle, cor, cornet à pistons, etc., un grand Trio pour piano, violon, violoncelle, plusieurs pièces pour orchestre ; puis un grand ouvrage sur l'enseignement du piano, représentant à peu près 400 planches. E. Anthiome tient modestement au Conservatoire une classe de piano préparatoire depuis le 1er janvier 1863. Il est aujourd'hui le doyen des professeurs du Conservatoire, ayant à son actif près de quarante ans de services.

(Annuaire des Artistes, 1899)

 

 

 

 

 

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