Ileana

 

 

 

 

Ballet en un acte d'après un conte roumain de Chesade. Livret et musique de Marcel BERTRAND.

 

Création au Théâtre de l'Opéra (Palais Garnier) le 20 mai 1936. Décor de Georges Mouveau. Chorégraphie de Léo STAATS.

Mlles Camille BOS (Ileana), Geneviève KERGRIST (Zolna), Simone BINOIS (la Gitane), Olga SOUTZO (la Reine), BARBAN, DIDION, DAMAZIO, GRELLIER (4 jeunes Filles).

MM. Serge PERETTI (Mirko), Lucien LEGRAND (Prince Stibor), RITZ, SERRY, SAUVAGEOT, PONTI (4 jeunes Pages).

Chef d'orchestre : Paul PARAY

 

3 représentations à l’Opéra au 31.12.1961.

 

 

 

 

Tiré d'un conte roumain de Chesades, ce ballet met en scène la princesse Ileana, secrètement éprise d'un page, le jeune Mirko. Mais la reine mère voudrait marier sa fille Ileana au prince Stibor. Mais une gitane sorcière connaît le philtre qui enchaîne les êtres l'un à l'autre ; elle le fait boire tout à la fois au prince et à la jolie Zolna ; il n'en faut pas plus pour que Stibor ne songe plus à Ileana et que celle-ci puisse épouser son page. Sur cette ingénue affabulation, M. Marcel Bertrand a composé une musique bien rythmée, sans recherches d'originalité, mais pleine d'agrément, qui a permis à Mlle Camille Bos et à M. Serge Peretti de mettre à profit leur parfaite technique de danse classique.

(Larousse Mensuel Illustré, 1936)

 

 

 

 

 

La rosée de ballets s'épand, de plus en plus abondante, sur notre première scène. Celui qu'on vient de nous offrir est inspiré d'un conte roumain de Chésade, et orné de musique par M. Marcel Bertrand. Sujet simple comme il convient à ce genre de spectacle : La reine, mère d'Ileana, la veut marier avec le prince Stibor, alors ruelle est éprise du page Mirko ; mais, grâce à un breuvage magique composé par une gitane et que la jeune fille sert au prince, celui-ci oublie son amour pour elle, et reporte sa tendresse sur une de ses suivantes, Zolna, qui lui a fait, il est vrai, de visibles avances ; il part avec elle, laissant Ileana libre de tomber dans les bras du page.

Il v avait là, sans contredit, bonne matière à danser. M. Marcel Bertrand n'a pas manqué d'en profiter, car ses rythmes sont nets, francs et directs. Peut-être aurait-il pu mettre davantage en valeur les thèmes roumains, dont quelques-uns sont tout à fait charmants, et qui auraient aussi gagné à être développés. Ses procédés ne sont d'ailleurs pas extrêmement variés, et les mêmes instruments tiennent dans son orchestration une place parfois trop prépondérante. Reconnaissons pourtant avec plaisir qu'en général, tout cela sonne bien, et que le compositeur semble avoir obtenu du public un sensible succès.

D'excellents danseurs y aidèrent : Mlle Camille Bos, qui fut une gracieuse et charmante Ileana ; M. Peretti, force, agilité, souplesse et précision. J'ajouterai : endurance étonnante, car à cette soirée, il dansa trois ballets successifs. Mlle Kergrist, Zolna provocante, Mlles Binois, Soutzo, M. Legrand, toutes et tous contribuèrent à un ensemble des plus séduisants. Rubans, paillettes, couleurs vives, éclairages lumineux, concourent à faire d'Ileana un spectacle qui satisfait pleinement les yeux.

Avec l'autorité et la netteté qu'on lui connaît, M. Paul Paray conduisait d'une main ferme la partition et les ébats chorégraphiques.

(Louis-Charles Battaille, l’Art musical, 29 mai 1936)

 

 

 

 

 

S'inspirant d'un conte roumain de M. Chesade, M. Marcel Bertrand a établi lui-même son scénario. La donnée en est choisie non sans bonheur. La jeune princesse Ileana est destinée, par la reine sa mère, à épouser le prince Stibor. Mais c'est Mirko qu'elle aime, le plus beau page de la Cour. Dans le tumulte de la fête qui célèbre l'arrivée du prince, Zolna, suivante d'Ileana, et entièrement dévouée à sa maîtresse, verse à Stibor « le boire amoureux ». Mordu des feux du philtre, le Tristan balkanique n'a plus d'yeux que pour Zolna. Ileana est sauvée, et la reine sa mère, se rendant aux faits, sanctionne l'union de sa fille avec le charmant Mirko. Amour triomphe au milieu des jeux et des ris.

Cette trame poétique, qui n'était pas sans exiger que le ballet se fit parfois mimodrame, eut porté volontiers une partition séduisante, mêlant le pittoresque et le sentiment. Celle de M. Marcel Bertrand, si elle n'atteint pleinement ni l'un ni l'autre, manifeste une indéniable bonne volonté qu'Apollon n'a pas voulu décourager en lui refusant la faveur de quelques pages bien venues. On les salue avec une satisfaction marquée d'avidité, car l'ensemble reste laborieux et sans éclat. La couleur locale, cependant judicieusement dosée, ne sauve pas un enchaînement de rythmes sans grâce et de timbres heurtés. La baguette si persuasive de M. Paul Paray ne réussit pas à nous hausser jusqu'au niveau où nous ne demandions qu'à nous laisser attirer.

M. Serge Peretti est un Mirko bondissant, ailé, charmant. Mlle Camille Bos traduit à ravir les chastes émois d'Ileana. Mlle Kergrist (Zolna) verse à M. Legrand (prince Stibor), dont on conçoit l'égarement, le philtre tout puissant de la gitane (Mlle Symone Binois). Mme Olga Soutzo porte avec dignité la couronne royale. Un double chœur de quatre jeunes filles et de quatre pages évolue avec une louable précision.

Dirai-je que j'ai aimé le décor de M. G. Mouveau ? Il semble emprunté aux plus poussiéreux recoins du magasin de l'opéra meyerbeerien, et l'étonnant pic glacé qui miroite au plein centre de la toile de fond ne l'améliore aucunement.

(Roger Vinteuil, le Ménestrel, 29 mai 1936)

 

 

 

 

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