Charlotte Corday

 

 

 

Drame lyrique en trois actes, un prologue et cinq tableaux, livret d'Armand SILVESTRE, musique d'Alexandre GEORGES.

 

   partition

 

 

Création à l'Opéra-Populaire (théâtre du Château-d'Eau) le 16 février 1901 ; mise en scène de G. Nerval.

  

 

 

personnages

créateurs

Charlotte Corday Mmes Georgette LEBLANC
Mme de Bretteville LAGARD
Simone Evrard DULAC
Barbaroux MM. Emile CAZENEUVE
Marat DANGÈS
le Comte de Lux CORIN
Chef d'orchestre Henri BÜSSER

 

 

 

Catalogue des morceaux

 

Prologue - la Taverne du Paon, à Paris, en 1793

Scène I

Marat, nous ne croyons qu'en toi Marat et ses Sectaires

Scène II

La la la la la la Foule acclamant Marat

Acte I - à Caen - Un salon chez Mme de Bretteville

Prélude

   

Scène I

Nous vivons dans des temps moroses Charlotte, Mme de Bretteville, Comte de Lux, Invités

Scène II

Sus à la tyrannie les Mêmes, les Girondins au dehors, Chœur

Scène III

Que tes maux sont légers Charlotte (seule)

Scène IV

Ciel ! qui vient ? - Un proscrit Charlotte, Barbaroux

Scène V

Il a fallu sans doute Charlotte (seule)

Scène VI

En tremblant je me suis levée Mme de Bretteville (seule)

Scène VII

C'est mal ce que je fais Charlotte (seule), les adieux de Charlotte

Acte II - à Paris - le Jardin du Palais-Royal en 1793

Prélude

   

Scène I

Courant à perdre haleine les Enfants surveillés par les Mères, Ronde

Scène II

Et sous sa robe d'or, Judith cacha le glaive les Mêmes, Charlotte

Scène III

Demandez : "l'Ami du Peuple" les Mêmes, Crieurs de journaux, Chœur

Scène IV

Le ciel, a dans cette rencontre Charlotte (seule)

Scène V

Où courez-vous, Charlotte ? Charlotte, Barbaroux

Scène VI

Allons, enfants de la Folie les Mêmes, Muscadins et filles, Chœur

Acte III - 1er Tableau - Chez Marat

Prélude

   

Scène I

Nous venons implorer l'appui les Solliciteurs et les Délateurs, Simone, Chœur

Scène II

Vive Marat ! C'est bien le maître qu'il leur faut ! les Mêmes, Charlotte

Scène III

C'est fait ! j'ai délivré la Patrie Assassinat de Marat, les Mêmes

Acte III - 2e Tableau - Une cellule à la Conciergerie

Prélude

   

Scène I

Adieu, mon cher papa Charlotte seule dans sa prison

Acte III - 3e Tableau - la Place de la Liberté

Prélude (Orage)

   

Scène I

Le peuple n'est pas un ingrat la Foule attendant Charlotte, Chœur

Scène II

Lâches ! elle a bien fait Charlotte sur la charette, Barbaroux

 

 

 

 

Le prologue se passe à Paris, à la taverne du Paon, où Marat, assis au milieu de ses compagnons et partisans, pérore et développe ses idées, leur déclarant que l'avenir est dans l'écrasement de la noblesse et de la bourgeoisie, dont le sang fécondera les moissons futures. Ses amis le portent en triomphe. Le premier acte nous mène à Caen, chez Mme de Bretteville, tante de Charlotte. Des invités sont réunis. Tandis que quelques-uns déplorent le malheur des temps, que d'autres jouent, Charlotte, à l'écart, relit le Comte d'Essex de Thomas Corneille (on sait que sa famille descendait des Corneille) et répète, d'un air inspiré, le vers fameux :

 

Le crime fait la honte, et non pas l'échafaud.

 

 Un jeune noble, le comte de Lux, en s'entretenant avec elle des graves événements de l’heure présente, lui en fait ressortir les dangers et lui offre sa protection en même temps que son amour. Charlotte décline cette offre, en alléguant que la situation est trop cruelle pour qu'on puisse et qu'on ose songer à autre chose. Bientôt, restée seule, elle entend de la rue retentir des cris furieux. C'est une bande de maratistes qui poursuit un malheureux. « Les lâches ! » s'écrie-t-elle. A ce moment la porte s'ouvre et un homme fait irruption. C'est Barbaroux, c'est lui qui était poursuivi. Charlotte l'interroge avec anxiété sur ce qui se passe à Paris. Barbaroux lui fait connaître la dictature de Danton, de Robespierre et de Marat. « Quel est le plus cruel des trois ? lui demande-t-elle. — C'est Marat. » Dès ce moment la résolution de Charlotte paraît prise de délivrer la France du monstre infâme. Pendant tout cet entretien, les paroles de Barbaroux lui inspirent un enthousiasme qui semble faire naître en elle une sorte d'intérêt passionné pour le girondin. Ils se quittent, et quand Barbaroux s'éloigne : « Au revoir, lui dit-elle, au revoir, à Paris ! » — Deuxième acte, à Paris, au jardin du Palais-Royal, où Charlotte, définitivement résolue, achète le couteau nécessaire à son dessein et se rencontre de nouveau avec Barbaroux. — Troisième acte, premier tableau : chez Marat, où Charlotte, après s'être fait introduire, le frappe dans sa baignoire et est bientôt entourée de gens qui l'écharperaient si des soldats n'intervenaient et ne l'emmenaient avec eux ; deuxième tableau : à la Conciergerie, où, dans son cachot, calme et tranquille, elle écrit aux siens, lorsqu'on vient la chercher pour la mener au supplice ; troisième tableau : l'échafaud sur la place de la Liberté ; arrivée de la charrette des condamnés ; Charlotte en descend, le bourreau la saisit, la toile tombe...

 

L'histoire de Charlotte Corday peut-elle fournir un bon livret d'opéra ? Il est permis d'en douter. Le fond est dramatique, assurément ; scénique, peu ; musical, absolument pas. Charlotte est une solitaire, une renfermée, une sorte d'hallucinée, intéressante au point de vue psychologique ; mais la psychologie n'est pas du domaine du théâtre. Pour lui prêter un peu d'expansion, l'auteur a été obligé de lui supposer une espèce d'amour cérébral pour Barbaroux, qu'il fait naître d'ailleurs d'une façon assez singulière. Mais de passion, de passion véritable, il ne peut y en avoir en un tel sujet, et sans la passion il n'est point de théâtre, surtout de théâtre musical. Aussi M. Alexandre Georges, qui n'est point le premier venu, n'a-t-il tiré qu'un parti médiocre du livret qui lui était confié. Ancien élève et aujourd'hui professeur de l'excellente École de musique classique, organiste de l'église de Saint-Vincent-de-Paul, M. Alexandre Georges a déjà beaucoup écrit : un opéra-comique, le Printemps ; un drame sacré, le Chemin de la croix ; un oratorio, Notre-Dame de Lourdes ; une saynète antique, Myrrha ; sans compter le reste. M. Alexandre Georges a de la grâce, de la tendresse, il paraît manquer de force et de puissance, et son orchestre marque encore une certaine inexpérience dans l'art d'accoupler les timbres et les sonorités. Possède-t-il les qualités de vigueur nécessaires au grand drame lyrique ? Ne serait-il pas plus apte à traiter certains sujets d'opéra-comique ? Diverses pages de sa partition sembleraient le donner à croire, surtout les scènes entre Charlotte et Barbaroux. Chez lui le mouvement n'est pas toujours spontané, et semble déceler l'effort, comme le tableau pittoresque et vivant du Palais-Royal. Au reste, si son œuvre est inégale, la faute en est beaucoup au poème dont il s'était chargé. Elle n'en reste pas moins celle d'un artiste instruit, distingué, qui sera sans doute plus complètement heureux le jour où il rencontrera un sujet convenant à ses facultés.

 

(Félix Clément, Dictionnaire des opéras, supplément d’Arthur Pougin, 1904)

 

 

 

 

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