Eugène BERTOL-GRAIVIL

 

Bertol-Graivil, caricature par Alfred Choubrac (1885)

 

 

Eugène Martin Léonard DOMICENT dit Eugène BERTOL-GRAIVIL

 

publiciste et auteur dramatique français

(Paris ancien 12e, 15 avril 1857* – Paris 17e, 19 octobre 1910*)

 

Fils de Martin Joseph DOMICENT (Ypres, Belgique, 1823 Paris 17e, 24 décembre 1897*), artiste peintre, et d’Euphémie Isabelle VAN MEENEN (– ap. 1910), mariés à Paris ancien 11e le 22 janvier 1855.

Epoux de Sara Mathilde Jeanne Adèle MOTTU (1858 – ap. 1910) ; parents d'André DOMICENT (1886 –), publiciste.

 

 

Employé à la Préfecture de la Seine, puis percepteur, il a débuté dans le journalisme en fondant, avec Victor Souchon, le Progrès Artistique, organe syndical pour la défense des intérêts des artistes musiciens instrumentistes ; puis collaboré à un grand nombre de journaux littéraires et politiques. Il a débuté au théâtre par la Rédemption d'Istar, drame lyrique, musique de Charles de Sivry. On lui doit beaucoup de pièces pour le théâtre, comédies, opérettes et revues : le Crime (1883), drame en cinq actes ; l'Assiette au beurre (1886), en cinq actes ; l'Ecole des gendres (1897), en quatre actes ; etc., et un grand nombre de pièces en un acte. Il a publié plusieurs volumes : Gambetta ; souvenirs (1883) ; les Voyages présidentiels illustrés (1889-1890) ; le Livre d'or des fêtes franco-russes (1894) ; des romans, etc., et quantité de monologues, saynètes, etc. Il fut syndic de la Presse républicaine, rédacteur à l'Echo de Paris, chevalier (03 août 1890) puis officier (01 août 1901) de la Légion d'honneur, et officier de l'Instruction publique.

En 1879, il habitait 147 rue de Rome à Paris 17e ; en 1897, 6 rue Descombes à Paris 17e ; en 1910, 175 rue de Courcelles à Paris 17e, où il est décédé en 1910 à cinquante-trois ans.

 

 

 

livrets

 

la Rédemption d'Istar, drame lyrique en 2 parties, musique de Charles de Sivry (Théâtre des Nations, 29 juin 1879, avec Mme Irma Marié [Istar] et M. L. Mauzin [le Berger]) => livret

Aveugle par amour, opérette en 1 acte, musique de Charles de Sivry (château de Ferrières, 10 décembre 1882 ; casino d'Etretat, 07 août 1883) => partition

Pédrolino, opéra-comique en 1 acte, musique d'Emile Boussagol (hôtel Continental, Paris, 13 avril 1893)

la Petite princesse, opérette en 1 acte, musique de Charles de Sivry (Théâtre d'Application de la Bodinière, 08 mai 1893)

le Sabre enchanté, opéra-comique en 1 acte, musique d'Emile Boussagol (Galerie Vivienne, 08 février 1894)

le Vieux sorcier, opéra-comique en 1 acte, musique de Félix Desgranges (Galerie Vivienne, 06 mars 1896)

le Duc de Messine, représenté sous le titre de Diane de Messine, opéra-comique en 4 actes, avec Charles Laborde, musique d'A. Dietrich (Grand Théâtre de Dijon, 07 mars 1896, avec MM. Roland [Andréa], François Garoute [le Duc], Clavel [Pandolfo])

la Czarine, opéra-comique en 3 actes, avec Armand Silvestre, musique de Georges Fragerolle (non représenté)

 

 

 

 

Bertol-Graivil

 

 

 

 

Une première à Dijon : Diane de Messine.

Notre chronique commence par un regret. Nous ne cessons, dans la vieille cité bourguignonne, de nous glorifier de notre amour pour les arts, en général, et pour la musique, en particulier ; mais ce sentiment reste lettre morte dès que l’occasion de le manifester se présente. Disons-le de suite, et preuves en mains : la représentation de Diane de Messine, hier samedi, a donné le dernier coup à ce vieux cliché d'éclectisme. Où était donc le public, ce jour-là ? Ces amateurs, ces connaisseurs, dont Dijon regorge, paraît-il, où étaient-ils, quand on les attendait pour avoir leur avis sur une œuvre nouvelle ? A tous les points de vue, l'abstention ou l'indifférence, en pareil cas, sont chose fâcheuse. D'un côté, les auteurs n'y trouvent pas d'encouragement à leurs travaux ; de l'autre, le directeur de théâtre, qui a fait œuvre de décentralisation, ne se sent pas porté à tenter une seconde épreuve, alors que la première n'a pas récompensé suffisamment ses efforts.

A présent, parlons de la partition.

L'ouverture, d'un grand développement, est construite sur un motif principal, qui lui sert de conducteur et qu'entoure une orchestration très riche.

Le solo de violoncelle produit un excellent effet sous l'habile archet de M. Fritsch.

PREMIER ACTE. — Les amis de Néri sont réunis : c'est le jour anniversaire de la délivrance de Sienne. Andréa Néri, dont la famille était autrefois puissante, regrette de voir le gonfalon de Sienne entre les mains de Pandolfo, une créature des Borghesi, et il veut renverser cet odieux pouvoir. Il rentre chez lui avec ses amis. Arrive Diane en costume de chasse. Les trompes sonnent. « La chanson du sanglier », qu'elle chante en entrant en scène, est de belle allure et d'un effet puissant. On sent vibrer les émotions de la vieille chanson populaire, et, sans contredit, le jour où cette page fut écrite, poète et musicien furent bien inspirés. L'orchestration très savante, dans laquelle les cuivres ont un rôle prépondérant, a une envergure vraiment chevaleresque. Diane Borghesi, fiancée de Néri, avant la lutte des deux familles, dénonce le complot d'Andréa et de ses amis. Pandolfo, le gonfalonier de Sienne, ridiculisé par la population qui ne l’aime pas, convoite la main d'Angèle, sœur d'Andréa. Il chante une ariette pleine d'originalité : « C'est le printemps, l'amour me pique. » L'orchestration en est très fine, et donne à la mélodie le piquant et le comique que demande la situation. M. Clavel l'a bien dite. L'acte finit par une grande scène, pendant laquelle Andréa est saisi et emmené en prison par les hommes de Pandolfo. Le chœur des conjurés, très bien chanté, a produit beaucoup d'effet.

ACTE II. — Diane veut délivrer Andréa et, toute puissante au palais, elle ordonne qu'on le lui amène. Elle évoque le souvenir du passé, en chantant « Les Stances » qui sont, à notre avis, la plus belle page de la partition. Andréa, un moment hésitant, s'écrie : « En t'écoutant, je sens que je deviens lâche ! Je me dois à ma tâche, adieu ! » Il rentre dans sa prison. Diane reste désespérée. Ou entend l'appel des trompettes. Le conseil se réunit, pour juger Andréa. Celui-ci conserve, vis-à-vis de ses juges, une attitude arrogante et hautaine. Il est condamné à 3,000 ducats d amende. Cœlio, duc de Messine, et protecteur de la République de Sienne, arrive, casque en tête et visière baissée. Entendant que les biens d'Andréa vont être vendus, il offre de payer la rançon, et se découvre. « Le duc, le duc ! » s'écrie-t-on. Il va prendre la place du magistrat indigne qui avait abusé de ses pouvoirs, et l'envoie en prison. Le couplet « La Justice » chanté pendant la séance du conseil, est très amusant, et mérite d'être cité.

ACTE III. — Diane veut se venger de Cœlio, qui l'a chassée de Sienne. Elle excite Andréa a la vengeance, en lui assurant faussement que le duc avait obtenu les faveurs de sa sœur Angèle, en retour de la rançon qu'il avait payée pour lui. Cette scène entre Diane et Andréa est d'un puissant effet. M. Roland y a été très beau. Il est à regretter que tous les rôles n'aient pas été tenus comme celui d'Andréa.

ACTE IV. — Une fête au palais du duc de Messine. — Les amis d'Andréa arrivent masqués et la main sur l'épée. Un héraut d'armes annonce que le duo convoque les Monts pour élire de nouveaux magistrats, et qu'il résignera ses pouvoirs entre leurs mains. Andréa remercie ses amis de vouloir venger son honneur. « Mon bras seul suffira », dit-il. Le ballet entre. Cette partie de la représentation a été, sans contredit, avec les chœurs, la seule complètement bonne. L'honneur en revient à l'orchestre, avec son excellent chef, et à Mme Rita-Rivo et ses gracieuses élèves. Il y a plusieurs numéros dans le divertissements : 1° Chœur dansé, en forme de valse ; 2° solo de violoncelle ; 3° mazurka et final. On en a vraiment goûté la musique, car elle est excellente, et l'on a pu comprendre ce que l'auteur voulait exprimer. Que n'en a-t-il été ainsi, dans l'interprétation générale ? Pendant le cours de la fête, Cœlio arrive, masqué. Angèle se jette à ses genoux et demande qu'on lui rende son fiancé qu'elle croit emprisonné. « Tu le veux ? » lui dit le duc, et il ôte son masque. « Ciel ! s'écrie Angèle, c'est vous Cœlio », et elle se jette dans ses bras. Cœlio demande à Andréa la main de sa sœur, pour sceller définitivement l'union des deux familles Borghesi et Néri. L'acte finit sur un chœur : « O jour d'ivresse ». Diane, de désespoir de se voir repoussée par tous, se précipite par une fenêtre du palais. Andréa ne peut la retenir et reste terrifié par ce dénouement.

Le poème dont nous venons de donner une sommaire analyse ne passionne pas, et il est difficile de retenir, après une première audition, autre chose que les lignes principales. Il aurait fallu posséder le scénario. Quant à la musique, si les détails aussi nous échappent, il nous en est resté une impression générale et qui est la bonne : c’est que la musique de M. Dietrich est toujours très claire et très distinguée. De plus elle est savante, sans le paraître, et l'orchestration pleine d'effets nouveaux et inattendus. Il est nécessaire que des études complémentaires soient faites, si la direction veut redonner cette œuvre.

 

(le Progrès de la Côte-d’Or, 10 mars 1896)

 

 

 

 

 

sa tombe au Père-Lachaise

 

 

 

 

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