Marguerite BAUX
Marguerite Baux dans Faust (Marguerite) en 1876 [photo Franck]
Anne Marie Thérèse Madeleine BAUX dite Marguerite BAUX
soprano français
(Moustiers-Sainte-Marie, Alpes-de-Haute-Provence, 29 décembre 1851* – ap. 1892)
Fille de Jean Élysée BAUX (Marseille, Bouches-du-Rhône, 29 octobre 1796 – Marseille, 9e registre, 13 octobre 1865*), maire de Marseille en 1848, et de Rosalie Louise Eudoxie ARNAUD (Marseille, 18 juillet 1814 – Rouen, Seine-Inférieure [auj. Seine-Maritime], 22 avril 1884*), mariés à Marseille, 3e registre, le 06 juillet 1833*.
Soeur d'Émile Adolphe Aristide BAUX (Marseille, 2e registre, 20 mai 1843* –), courtier.
Elle a été nommée officier d'académie le 13 janvier 1892.
Sa carrière à l'Opéra de Paris
Elle a débuté le 04 février 1876 dans la Juive (Rachel).
Elle a chanté le Freischütz (Agathe, 1876) ; le Prophète (Berthe, 1876) ; Don Juan (Elvire, 1876) ; le Roi de Lahore (Sita, 07 mai 1877) ; Robert le Diable (Alice, 04 juillet 1877). |
Quand une artiste fait ses débuts à l'Opéra de Paris, sans avoir jamais paru sur aucune autre scène, il est bien rare qu'elle puisse s'y acclimater immédiatement. Pour passer d'un milieu aussi étroit que l'est une chambre d'étude à une salle aussi vaste que celle de l'Académie nationale de musique, il faut plus que de la voix et du talent pour y faire bonne figure, il est nécessaire d'être déjà tant soit peu rompu à l'interprétation d'un ouvrage dans son entier. Aussi les exemples sont-ils rares, de jeunes artistes commençant leur carrière à l’Opéra et prenant une place, dès le début, dans le répertoire. Mlle Marguerite Baux est entrée dans ces conditions peu favorables sur notre première scène. Sans passé artistique, elle a affronté, du premier coup, le rôle écrasant de Rachel de la Juive, et n'y a pas été au-dessous de sa tâche. Née à Marseille, d'une famille de commerçants elle a appris la musique avec des maîtres particuliers, sans passer par le Conservatoire. Douée d'une voix puissante et chaude, d'une jolie figure et d'une physionomie sympathique, elle pouvait songer à tenir une place honorable au théâtre ; aussi ses études furent-elles dirigées de ce côté. C'est Reyer, l'auteur du Selam et de la Statue, qui découvrit les ressources que l'on pouvait tirer de sa riche organisation. Ayant le feuilleton du Journal des Débats à sa disposition, il présenta, bien avant son début, la future pensionnaire de l'Opéra, au public parisien, et pendant plusieurs mois les journaux, en quête de nouvelles, parlèrent d'une étoile naissante qui devait venir rivaliser avec Mlle de Reszké, pour combler le vide laissé par le départ de Marie Sass et de Mlle Mauduit. A ce moment, Massenet pensait à faire représenter son nouvel oratorio : Eve, paroles de Louis Gallet, et venait de confier sa partition à M. Lamoureux, qui avait si brillamment fait exécuter par son orchestre et ses soli du chant, les grandes œuvres de Händel. Il fut un moment question de Mlle Marguerite Baux pour interpréter l'ouvrage du jeune maître. Mais pour des raisons que je ne connais pas bien, — l'inexpérience peut-être, ou encore la force des engagements déjà pris avec M. Halanzier, — le rôle passa dans les mains d'une chanteuse de grand talent, Mme Brunet‑Lafleur, qui le rendit avec éclat. Marguerite Baux avait cependant bien le type d'Eve, et nulle doute que son genre de beauté n'eût été particulièrement remarqué dans cette création, bien qu'elle se serait effectuée, évidemment, sans les ressources de la mise en scène. Mais il vient toujours à l'esprit de l'auditeur l’idée de comparer l'interprète au personnage qu'il représente et l'on se fut fait facilement, à l'image d'Eve sous les traits de cette charmante jeune fille, blonde comme des épis de blés, et en pleine floraison de son adolescence. Quoi qu'il en soit, M. Halanzier avait engagé Mlle Baux, à l'Opéra, et ses débuts furent annoncés longtemps à l'avance. Elle devait paraître pour la première fois dans Faust, mais les nécessités du théâtre ne le permirent pas et ce fut, comme je l'ai dit plus haut, dans le rôle de Rachel, de la Juive, qu'elle fit ses premiers pas devant le public, le même soir que Mlle Vergin, qui débutait, elle aussi, par le rôle de la princesse Eudoxie. Les deux natures étaient bien différentes et elles se nuisirent au lieu de s'entr'aider. Mlle Vergin, très habile vocaliste et habituée au public, par les exercices du Conservatoire, fit paraître Mlle Marguerite Baux un peu inexpérimentée pour la première scène du monde ; et d'autre part, la voix brillante, colorée, de la jeune Marseillaise, son éclatante jeunesse accentuèrent davantage la ténuité de l'organe de sa camarade. La presse tout entière leur fut sympathique tout en recommandant à l'une de ne pas forcer sa voix sur une scène trop vaste pour elle, et à l'autre de se mettre courageusement à l'étude afin de tenir promptement les sérieuses promesses que faisaient déjà naître ses ressources naturelles. Mlle Baux fit son second début dans le rôle de Marguerite de Faust. Terrible épreuve aux lendemains de Mme Miolan‑Carvalho ! Mais la jeunesse ne peut-elle pas tout oser lorsque, à défaut de la science parfaite et du sentiment exquis, elle vient exhaler comme un parfum de fraîcheur qui rajeunit. Depuis ces deux tentatives, Marguerite Baux n'a plus reparu sur la scène. Les représentations de Jeanne d'Arc ont d'ailleurs pris presque toutes les soirées, et voici Sylvia qui ne laissera pas de sitôt le champ libre aux drames lyriques. Nous espérons toutefois que M. Halanzier gardera sa jeune pensionnaire. Nous savons qu'il fonde, et très justement, les plus grandes espérances sur Mlle de Reszké, mais la brillante cantatrice dont la place est aujourd'hui bien assise à l’Opéra et qui jouit de la faveur méritée du public, a besoin d'être doublée et nous croyons que Mlle Baux serait très bien placée après elle dans ces conditions, et pourrait former son talent de façon à prendre, elle aussi, un jour à venir, la première place. S'il en était autrement, nous aurions encore à regretter de voir une belle organisation partir pour la province et se perdre, car il n'y a qu'il Paris ou les débutants puissent se perfectionner et conserver les bonnes traditions.
(Félix Jahyer, Paris-Théâtre, 15 juin 1876)
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Une bonne nouvelle pour finir. M. Halanzier vient d'engager pour trois années une future Nilsson ayant nom Marguerite Baux. Mlle Baux, fille de l'ancien maire de Marseille, est une jeune personne du meilleur monde, blonde comme la Marguerite de Goethe comme l'Ophélie de Shakespeare, et douée d'une voix séraphique. Elle chante déjà en artiste et promet de devenir bientôt une étoile. Ses débuts auront lieu dans Faust. (le Ménestrel, 07 mars 1875)
Les débuts de Mlle Marguerite Baux, à l'Opéra, où elle a été admise d'une brillante manière, doivent avoir lieu très prochainement. On suppose que c'est dans Marguerite, de Faust, que paraîtra la Marguerite marseillaise, blonde comme celle qu'elle doit représenter. (le Petit Journal, 15 mars 1875)
Marguerite Baux va suivre l'exemple de Mme Franck-Duvernoy et embrasser la carrière italienne. L'Italie a donc bien des attraits pour nos chanteuses et nos chanteurs ? se demande à ce propos M. Besson de l'Événement. L’Italie, peut-être, mais l'italien certainement ; car c'est la langue cosmopolite pour la musique, celle qui donne accès non seulement aux grands théâtres de la Péninsule, mais à ceux de l'Espagne, de l'Allemagne, de l'Angleterre, de la Russie et du Nouveau-Monde. (le Ménestrel, 14 août 1881)
Ainsi que nous le disions dans nos échos de théâtre, Mlle Baux vient d'obtenir un grand succès au Grand-Théâtre de Lyon. Mlle Marguerite Baux est une artiste du monde : son père était maire de Marseille en 1848. Elle est la nièce de M. Baux, un des armateurs les plus riches de la ville, et la cousine de M. Fraissinet, député à l'Assemblée nationale, actuellement trésorier-payeur à Montpellier. Elle a chanté plusieurs années à l'Opéra, et nous ne comprenons pas que M. de Vaucorbeil n'ait pas retenu auprès de lui une artiste de son talent. (le Gaulois, 17 octobre 1881)
Une découverte intra-stellaire, une merveilleuse trouvaille que fit M. Reyer, un jour qu'il voyageait dans le domaine artistico-lyrique, dont on s'était complu jusqu'alors à regarder M. Bischoflein comme l'astronome juré. A cette nouvelle, Auber, Meyerbeer, Halévy, tous les dieux sévères de la grande musique, frémirent de joie dans leur ciel de triples croches et on se hâta de faire entrer à l'opéra — Halanzier regnante — la grasse fille en rupture de maternelle Canebière. Sans doute, pour y faire équilibre cette puissante Mlle Rosine Bloch, tellement ronde, disait Mahalin, que, si on la laissait tomber au fond de la scène, elle roulerait sans pouvoir se relever jusqu'au trou du souffleur. Malheureusement, l'équilibre fut vite rompu — défaut de poids sans doute — et Mlle Baux s'enfuit vers Lyon, d'où elle nous est arrivée en droite ligne. Aujourd'hui, je ne conseillerais plus à Mlle Bloch de tenter avec elle la concurrence, tant sa voix, comme sa personne, sont maintenant remplies d'agréables rondeurs. Cette belle Impéria bat son plein, comme pour parler au 16me siècle. C'est qu'aussi elle est réellement majestueuse avec cette figure qui, cependant, ne repose encore que sur deux mentons ; avec ces bras puissants, ces épaules magnifiques, cette abondante poitrine, qui semble avoir inspiré à André Roswein ce hardi assemblage de mots : « du marbre liquide. » Avec cette physionomie à nez légèrement busqué je ne puis voir Mlle Baux sans songer à un grand patriote, à M. Thiers ; M. Thiers avec de la gorge s'entend ! Les curieux se demanderont où elle a bien pu mettre son cœur sous d'aussi puissants appâts, et d'aucuns prétendent qu'il a été égaré sur la route de Lyon, ce qui n'aurait rien d'étonnant, étant donné la négligence de la compagnie. Là est le grave problème qui préoccupe les mathématiciens de coulisses et les algébristes d'avant-scène ; et, lorsqu'impuissants, ils eurent demandé son secret à la blonde diva, celle-ci, les regardant de ses grands yeux gouailleurs, a l'air de leur dire : « adorez-moi, je me moquerai de vous ; moquez-vous de moi, je vous adorerai ... si j'en ai le temps. » (Myop, la Cloche d’argent, 03 décembre 1882)
Rouen. — Le Théâtre des Arts reprenait, la semaine dernière, Robert le Diable. La représentation a été très brillante. Mlle Marguerite Baux, qui était merveilleusement en voix, a chanté avec une observation parfaite des nuances le rôle difficile d'Alice, et le public ne lui a ménagé ni les bravos ni les rappels. (Officiel-Artiste, 11 novembre 1883)
Françoise de Rimini au Théâtre des Arts à Rouen. — Mlle Marguerite Baux — qui avait enterré sa mère la veille — a surmonté sa profonde douleur et a consenti a jouer son rôle de Francesca, pour ne pas laisser perdre au personnel si intéressant des chœurs, le fruit de cette superbe représentation. Mlle Baux s'est fait admirer, comme chanteuse et comme tragédienne, d'un bout à l'autre de l'œuvre. Elle a joué et déclamé tout ce rôle de douleur avec sa propre douleur à elle et elle a ému profondément le public, qui lui a fait une ovation prolongée. Le duo du prologue : « Oh ! la cruelle épreuve » et la scène finale du deuxième acte : « Il vit... celui que j'ai pleuré » ont été salués d'acclamations. C'est qu'aussi c'était de la douleur vécue, cela... (le Ménestrel, 04 mai 1884)
Mlle Marguerite Baux, qu'on a applaudie naguère à l'Opéra de Paris et qui, depuis, a fait une très brillante carrière sur nos grandes scènes de la province, vient d'être engagée à de belles conditions, par l'impresario Ferdinand Straskoch, qui va la faire chanter, d'abord, au théâtre de Trieste. Elle finira la saison à Rome, au Costanzi, avec M. Sonzogno. (le Ménestrel, 30 septembre 1888)
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publicité d'avril 1891