Léon ACHARD
Léon Achard, photo Etienne Carjat [BNF]
Léon ACHARD
ténor français
(Lyon, Rhône, 16 février 1831* – Paris 16e, 11 juillet 1905*)
Fils de Pierre Frédéric ACHARD, acteur et chanteur comique, et de Rosalie LIEZ, légitimé par leur mariage à Paris ancien 2e le 28 décembre 1841*.
Frère de Charles ACHARD, ténor ; demi-frère de Frédéric ACHARD, acteur.
Epouse à Paris 9e le 30 juin 1864* Eugénie Adélaïde Fanny LE POITTEVIN (Paris ancien 2e, 28 janvier 1846* – Paris 12e, 27 novembre 1926*) [fille d'Eugène Modeste Edmond LE POITTEVIN (Paris ancien 2e, 31 juillet 1806 – Paris 16e, 06 août 1870*), artiste peintre, et d'Adélaïde Marie Françoise PÉRONIN (1812 – ap. 1870)].
Parents d'Henri ACHARD (Paris 16e, 04 décembre 1868* – Paris 16e, 19 février 1877*), d'André ACHARD (Paris 16e, 02 décembre 1876* – Paris 16e, 14 février 1877*), et d'Henriette Marie Andrée ACHARD (Paris 16e, 12 avril 1879* –) [épouse à Paris 16e le 19 novembre 1904* (divorce le 13 mars 1913) Alexandre François dit Frank MATTHYSSENS (Paris 16e, 17 avril 1883* – Nice, Alpes-Maritimes, 01 avril 1966)].
Tout en lui faisant cultiver ses dispositions pour la musique, son père lui fit faire ses études dans un lycée de Paris. Reçu bachelier, Léon Achard prit ses inscriptions à l'Ecole de droit, dont il suivit les cours, et obtint en 1852 le grade de licencié. Il entra alors comme clerc dans une étude d'avoué ; mais, doué d'une charmante voix de ténor et poussé par son goût vers le théâtre, il se fit admettre comme élève au Conservatoire de musique et obtint en 1853 un deuxième accessit d'opéra-comique, et en 1854 le premier prix d'opéra-comique à l'unanimité. Engagé cette même année au Théâtre-Lyrique, Achard y fit ses débuts le 07 octobre 1854 dans le rôle de Tobias du Billet de Marguerite. Son physique agréable, son franc sourire, son geste élégant, son jeu plein de chaleur et sa voix sympathique lui acquirent aussitôt les suffrages du public. Le jeune chanteur joua avec un vif succès les rôles de ténor dans les Charmeurs, le Muletier de Tolède, les Compagnons de la Marjolaine, le Barbier de Séville, etc. A la mort de son père (1856), Achard quitta le théâtre. Toutefois, il ne tarda pas à y rentrer et signa un engagement avec le directeur de l'Opéra de Lyon, où son succès fut complet ; il y créa Jaguarita, les Dragons de Villars, Faust, les Amours du Diable, Rigoletto, etc., et joua le répertoire. En 1862, il quitta cette ville pour revenir à Paris, à l'appel de Perrin, devenu directeur de l'Opéra-Comique, Là, il partagea les premiers rôles avec Montaubry et régna sans partage après le départ de ce dernier. Il reprit les principaux rôles de l'ancien répertoire, joua dans Haydée, la Dame blanche, le Songe d'une nuit d'été et créa, avec un succès constant, les rôles de ténor dans les pièces nouvelles. Le 16 décembre 1862, il chanta la 1000e à l'Opéra-Comique de la Dame blanche et dit les Stances à Boieldieu de Joseph Méry. Il fit des tournées en France et en Belgique (1870-1872) ; puis en Italie (1872-1875) et créa Mignon de Thomas en italien. En 1873, il entra à l'Opéra, débuta dans la Coupe du roi de Thulé, puis joua dans les Huguenots, l'Africaine, où il interpréta brillamment le rôle de Vasco de Gama, etc. Excellent dans les morceaux qui demandent de la grâce et du charme, il réussit moins dans ceux qui exigent une grande puissance vocale et le sentiment dramatique. Tournée du Requiem, en France et Belgique (1876). En mars 1876, il revint quelque temps à l'Opéra-Comique, sa vraie place, et inaugura brillamment sa rentrée dans le rôle de Georges de la Dame blanche. En 1880, il avait encore participé à la première du Roi de Lahore de Massenet à Lyon. Puis il quitta la scène et fut nommé professeur de déclamation lyrique (opéra-comique) au Conservatoire de Paris du 1er avril 1887 à sa retraite, le 25 octobre 1901, et officier de l’Instruction publique.
En 1864, il habitait 28 rue Saint-Georges à Paris 9e ; en 1868, 5 villa de la Réunion [auj. grande avenue de la Villa-de-la-Réunion] à Paris 16e (quartier d'Auteuil) ; en 1895, 38 avenue de Wagram à Paris 17e. Il est décédé en 1905 à soixante-quatorze ans, en son domicile, 63 rue Michel-Ange à Paris 16e. Il est enterré au cimetière de Montmartre (9e division).
Sa carrière au Théâtre-Lyrique
Il y débuta le 07 octobre 1854 en créant le Billet de Marguerite (Tobias) d'Auguste Gevaert.
Il y créa également le 07 mars 1855 les Charmeurs de Ferdinand Poise ; le 06 juin 1855 les Compagnons de la Marjolaine d'Aristide Hignard ; le 29 décembre 1855 l'Habit de noce de Paul Cuzent ; le 16 avril 1856 le Chapeau du roi d'E. Caspers.
Il y participa à la première le 19 juin 1855 de la Sirène d'Esprit Auber ; le 14 septembre 1855 de Marie de Louis Ferdinand Herold.
Il y chanta le Muletier de Tolède, le Barbier de Séville. |
Sa carrière à l'Opéra-Comique
Il y débuta le 04 octobre 1862 dans la Dame blanche (Georges Brown ; 1000e le 16 décembre 1862).
Il y chanta Haydée ; le Songe d'une nuit d'été ; le Pré-aux-Clercs.
Il y créa le 11 janvier 1864 la Fiancée du roi de Garbe (Don Alvar) d'Esprit Auber ; le 29 décembre 1864 le Capitaine Henriot d'Auguste Gevaert ; le 05 février 1866 Fior d'Aliza (Géronimo) de Victor Massé ; le 17 novembre 1866 Mignon (Wilhelm Meister) d'Ambroise Thomas ; le 11 avril 1876 Piccolino (Frédéric) d'Ernest Guiraud.
Il y participa à la première le 10 mai 1869 de Jaguarita l'Indienne de Fromental Halévy. |
Sa carrière à l'Opéra de Paris
Il débuta salle Le Peletier le 10 janvier 1873 en créant la Coupe du roi de Thulé (Yorick) d'Eugène Diaz.
Il a chanté les Huguenots ; l'Africaine (Vasco de Gama) ; puis, au Palais Garnier, Faust (Faust) et la Favorite (Fernand) en 1875. |
Léon Achard, photo de Carjat (1864)
L'idole de Lyon ; la tournure d'un chef de rayon du Petit-Saint-Thomas, section des lainages. Bon garçon, ténor de naissance, il appartient à cette catégorie de chanteurs qui étaient tout avant de monter sur les planches. Comme Renard, Poultier, Labat et d'autres, Achard se destinait à remplir les fonctions de bandagiste herniaire, sans doute ; sa voix s'en ressent, il y a des tampons qui l'assourdissent par endroits à côté de ressorts d'une élasticité extraordinaire. Une excellente acquisition pour l'Opéra-Comique, mais pour laquelle on a fait trop de bruit. Écoute ses camarades répéter, caché dans une baignoire, c'est un tic. (Yveling Rambaud et E. Coulon, les Théâtres en robe de chambre : Opéra-Comique, 1866)
Après avoir appris de bonne heure les premiers éléments de la musique, M. Achard fit ses études littéraires au collège Henri IV, où il eut pour condisciple M. Victorien Sardou, puis suivit les cours de l'École de droit, et se fit recevoir licencié en 1852. Il entra alors dans une étude d'avoué, et en même temps devint élève de Bordogni au Conservatoire. Ayant obtenu, dans cet établissement, un second accessit d'opéra-comique en 1853 et le premier prix en 1854, il fut engagé aussitôt au Théâtre-Lyrique, et débuta à ce théâtre, le 7 octobre, dans un opéra de M. Gevaert, le Billet de Marguerite, qui servait aussi de début à Mme Deligne-Lauters, devenue depuis Mme Gueymard. Fort bien accueilli par le public, M. Achard, dont la jolie voix de ténor était fraîche et pleine de charme, et chez qui l'on entrevoyait déjà les qualités d'un bon comédien, fit successivement plusieurs créations, dans les Charmeurs, de M. Poise, le Muletier de Tolède, d'Adam, les Compagnons de la Marjolaine, de M. Hignard, l’Habit de noces, de Paul Cuzent, et joua aussi plusieurs ouvrages du répertoire : le Barbier de Séville, Ma Tante Aurore, Marie, la Sirène, etc. En 1856, la mort de son père vint éloigner momentanément M. Achard du théâtre. Pourtant, après un silence de quelques mois, le jeune chanteur signa un engagement avec M. Halanzier, alors directeur du Grand-Théâtre de Lyon, et alla tenir dans cette ville l'emploi des premiers ténors légers, jusqu'à l'époque où M. Perrin l'appela à l'Opéra-Comique. Il débuta à ce théâtre, le 4 octobre 1862, dans la Dame blanche, joua successivement Haydée, le Songe d'une nuit d'été, le Domino noir, le Pré-aux-Clercs, et créa des rôles importants dans le Capitaine Henriot, Fior d'Aliza, Mignon, et divers autres ouvrages. En 1871, M. Achard, qui avait étudié déjà le chant italien, se rendit à Milan, reprit ces études sous la direction d'un maître habile, puis, après avoir signé un traité avec le théâtre de la Fenice, de Venise, alla passer une saison en cette ville, où il fut fort bien accueilli, et où il chanta, entre autres ouvrages, Romeo e Giulietta de M. Marchetti, et la traduction italienne de Mignon. Bientôt M. Halanzier, devenu directeur de l’Opéra, l'engagea à ce théâtre pour créer le rôle de Yorick dans la Coupe du roi de Thulé, l'ouvrage couronné de M. Diaz. Après avoir établi ce rôle, M. Achard se montra successivement dans les Huguenots, où il obtint surtout du succès, dans l'Africaine, Faust, Don Juan et la Favorite. Depuis lors il est rentré à l'Opéra-Comique, où il a créé un rôle important dans un ouvrage de M. Ernest Guiraud, Piccolino. (François-Joseph Fétis, Biographie universelle des musiciens, supplément d'Arthur Pougin, 1878-1880)
|
Le chanteur Léon Achard à Auteuil.
Une modestie excessive et constante accompagnant un grand talent d'artiste est chose bien rare. Quelque méritoire qu'elle puisse sembler, comme elle est de nature à attirer l'oubli sur celui qui s'en enveloppait, il appartient, me semble-t-il, à notre Société historique de conjurer cet oubli lorsqu'il pourrait atteindre un personnage qui a vécu dans notre région. Tous ceux de ma génération connaissent et ont répété bien des fois avec éloge le nom de Léon Achard, le célèbre ténor, dont ils ont bien souvent applaudi les chants pleins de charme sur les grandes scènes de Paris et de province. Il habita pendant de longues années à Auteuil, y posséda une propriété et revint y terminer ses jours. L. Achard descendait d'une vieille famille de Nîmes, qui occupa jadis une assez grande situation dans cette région du Languedoc. Son père (Pierre-Frédéric) était né à Lyon en 1808 et mourut à Paris en 1856. Bien connu comme acteur et chanteur comique, engagé, après sa sortie du Conservatoire, au théâtre du Palais-Royal, où il fit de nombreuses créations, soit comme partenaire de Mme Déjazet, soit seul, il parut en 1844 sur la scène du Gymnase et y joua avec succès dans diverses pièces ; il avait un véritable talent et se fit particulièrement applaudir dans les chansonnettes, dont il mit le genre à la mode. Son fils Léon naquit également à Lyon, le 16 février 1831. Après s'être livré tout jeune au travail de la musique, il fit de bonnes études classiques au collège Henri-IV, où il eut pour condisciple Victorien Sardou, qui ne cessa de lui témoigner son amitié et son estime. Une fois reçu bachelier, il suivit les cours de l'École de droit et obtint le diplôme de licencié en 1852. Puis il entra dans une étude d'avoué ; mais Thémis le séduisant moins que la muse Euterpe, pour laquelle il se sentait une irrésistible passion, il se fit admettre dans une classe du Conservatoire, menant ainsi de front deux choses bien disparates : la chicane, cette science fâcheuse et terre à terre, et le plus idéal des arts, la musique. En 1854, le premier prix d'opéra-comique, qu'il obtint, lui ouvrit toute grande la carrière pour laquelle il éprouvait une véritable vocation et où il devait s'illustrer. Le 9 octobre de la même année, il débutait au Théâtre-Lyrique, dans le rôle de Tobias du Billet de Marguerite (Gevaert). Il y chanta ensuite les rôles de Julien dans les Charmeurs (Adam), de Manoel dans le Muletier de Tolède (Poise), de Simplice dans les Compagnons de la Marjolaine (Poise). Il venait d'y jouer Almaviva dans le Barbier de Séville, lorsque la mort de son père, en 1856, l'éloigna momentanément du théâtre. Après s'être occupé d'affaires pendant quelques mois, il accepta de M. Halanzier un engagement pour six années à Lyon, où il eut un grand succès. Il consentit à revenir à Paris lorsque M. Perrin reprit la direction de l'Opéra-Comique, où il débuta le 4 octobre 1862, dans le rôle de George de la Dame blanche ; ce fut un succès presque sans précédent, qui assura une longue série de représentations à la reprise de l'œuvre charmante de Boieldieu ; pour parler de notre artiste, on disait désormais : « Achard, de la Dame blanche. » Puis ce furent Haydée, le Songe d'une nuit d'été, la Fiancée du roi de Sicile, Fior d'Aliza, Piccolino (Guiraud), toutes créations de rôles ou grandes reprises qui furent des triomphes pour le ténor favori du public, dont on admirait le charme, la grâce, le sentiment, la méthode impeccable. Ce furent encore la reprise du Pré-aux-Clercs, la création du rôle de ténor dans Mignon, où Achard avait comme partenaire Mme Galli-Marié (qui, par une triste coïncidence, est décédée la même année que lui), le Capitaine Henriot (Gevaert). En 1866, Achard était venu s'établir en famille dans un coin tranquille et retiré d'Auteuil, où sa mère vivait déjà depuis deux ans, dans la villa de la Réunion, fondée depuis 1856 par M. Zédé, actuellement circonscrite par la rue Chardon-Lagache, l'établissement de Sainte-Périne, l'avenue de Versailles, les rues Jouvenet et Lancret ; c'était au numéro 5 de cette villa ; plus tard il s'établit au numéro 4. Il vécut là jusqu'en 1879. En 1873, M. Halanzier l'engagea à l'Opéra. Il y débuta dans le rôle de Yorick de la Coupe du roi de Thulé, puis dans les rôles, bien lourds à supporter, de Raoul dans les Huguenots, de Vasco de Gama dans l'Africaine. En 1876, il revint pendant quelque temps à l'Opéra-Comique, puis quitta définitivement la scène et fut nommé en 1887 professeur de chant (opéra-comique) au Conservatoire. Ses excellentes leçons formèrent d'excellents élèves, créèrent des artistes de valeur, tels que : Jeanne Hatto, Louise Grandjean, Rousselière, à l'Opéra ; Charlotte Wyns, Mlle Tiphaine, Vieuille, Carbonne, Allard, Azéma, à l'Opéra-Comique. Léon Achard, usé par le travail, l'âge et la maladie, résigna ses fonctions de professeur au Conservatoire en 1901. Il revint, en 1904, se fixer dans cet Auteuil qu'il affectionnait, rue Michel-Ange, au numéro 63, propriété dépendant du hameau Boileau, fraîche et reposante, avec son corps de logis peu élevé et allongé, ses vieux arbres, ses pelouses, son avenue d'entrée qui l'éloigne des bruits et du mouvement de la voie publique. Il y est mort, entouré de l'affection des siens, le 10 juillet 1905, à l'âge de 74 ans. A cette époque de l'année, la villégiature avait éparpillé bien loin de Paris la plupart de ceux qui auraient voulu rendre un dernier hommage à Léon Achard, leur ami, leur camarade ou leur maître, car ce grand et modeste artiste, doux et timide, simple, désintéressé, obligeant et charitable, ne comptait partout que des sympathies, sans un ennemi, sans un jaloux. M. Gailhard, directeur de l'Opéra, prononça sur sa tombe, au cimetière Montmartre, un discours ému, et fit de lui un éloge que nul ne pouvait songer à contester. L. Achard avait épousé la fille du célèbre peintre Le Poittevin, qui, à l'âge de 20 ans, en 1826, exposait sa première toile des Moissonneurs, achetée par la duchesse de Berry, et dont les nombreuses œuvres de genre, se succédant jusqu'en 1869, devaient le ranger au nombre des artistes les plus estimés. De ce mariage naquirent deux fils, morts en bas âge, et deux filles, dont l’aînée a épousé notre collègue M. Franck Matthyssens. Parmi les frères et les neveux ou nièces de Léon Achard, on pourrait citer, dans l'art musical et dans l'art dramatique, des personnalités distinguées et bien connues du public.
(Tabariès de Grandsaignes, Société historique d'Auteuil et de Passy, 4e trim. 1905 et 1er trim. 1906)
|
chapelle funéraire de la famille Achard au cimetière de Montmartre [photo ALF, 2022]