A l'Ecole de Danse

avec Mesdemoiselles GUILLOT et DYNALIX

Relevé sur la pointe (classe de Mlle Dynalix)

Une école qui n'a point pignon sur rue comme tant d'autres, dont les élèves ne peuvent rêver plus brillante existence pour l'avenir... Une école à effectif réduit, il est vrai : 110 fillettes et 30 garçons cette année.

Une école de préparation professionnelle qui dispose de quatre grandes salles voisines des combles et dont l'une donne la sensation d'être un manège, avec ses murs nus agrémentés seulement de longs rouleaux de bois : la barre. Tout au fond, une glace immense qui happe visages et silhouettes dès qu'on entre dans la pièce. Quelques bancs, un piano : c'est tout l'ameublement.

Arabesque à la barre (classe de Mlle Guillot)

Une école qui soigne les enfants comme fleurs de serre, fait contrôler chaque mois leur santé par le médecin du théâtre, les confie à des surveillantes dont la férule fait place à un constant souci de leur enseigner hygiène précoce et prudence dans le zèle.

***

Assouplissement à la barre (Mlle Guillot)

Petites choses à noter : le fichu à portée de la main, pendant les exercices, afin d'éviter, au repos, le refroidissement ; près du piano, l'arrosoir plein pour, s'il le faut, faire manger le plancher à la poussière toujours nocive ; le déjeuner à la cantine où l'on admet les élèves depuis qu'ils ne vont plus à l'école communale de la rue de la Ville-l'Evêque pour préparer le certificat d'études exigé de tout candidat à l'engagement dans le ballet. On s'en préoccupe maintenant chaque jour, tout là-haut, sous une verrière où sont aménagés pupitres et bancs, bureau de l'institutrice, tableau noir qui donne le ton.

La pause (Mlle Dynalix et ses élèves)

Filles et garçons doivent faire connaissance avec l'esclavage de l'horaire : 8 heures 20, le matin, rassemblement dans la cour de l'Opéra. Puis prémices de la discipline en montant les escaliers par rangs silencieux. Programme de la « communale ». Onze heures et quart : fin des leçons.

Repas substantiel ; promenade et récréation au proche square Louis XVI... 13 heures, retour à l'Opéra.

Voici enfin venue l'heure bénie où l'on accorde le tout neuf instrument de la Danse, jeune corps vêtu d'une tunique blanche et portant aux pieds les chaussons roses, emblème de la profession.

Recherche d'attitude (Mlle Dynalix)

Un nœud de couleur permet de distinguer la division à laquelle appartient le « petit rat ».

 ***

Tous les professeurs sont d'anciennes danseuses ayant toutes appartenu au corps de ballet de la Maison. Les deux dernières nommées sont Mlles Guillot et Dynalix. Ne suffit-il pas de les citer pour montrer qu'accomplir une tâche de maîtresse d'école n'est pas incompatible avec l'âge d'une féminité rayonnante ?

Grand jeté (Mlle Guillot)

Mlle Guillot, première danseuse de caractère, se distingua dans l'Appel de la Montagne, le Prince Igor, Coppélia, Guignol et Pandore. Là, ses dons pédagogiques peuvent se manifester ; pour elle, « la danseuse qui aime son métier se discipline elle-même ». Avec les débutants, sa méthode tend à donner aux enfants des muscles en longueur et, pour cela, leur apprendre à contrôler et leurs muscles des jambes et ceux des reins, leur donner le goût de la perfection qui ne s'obtient que par la précoce volonté de l'exercice, leur faire comprendre que les exercices préparatoires doivent être longs avant d'aboutir même à un simple assemblage de pas, leur placer les bras de telle sorte que vienne l'élégance du mouvement.

Une ambiance de grande confiance entre élèves et professeur règne dans la classe de Mlle Dynalix dont on se rappelle notamment les interprétations dans Giselle, les Mirages, Coppélia. D'un sourire, Mlle Dynalix qui, tout en enseignant poursuit sa carrière de première danseuse, sait pallier une remontrance. Du simple jeu des positions à la barre jusqu'aux esquisses de figures de ballet par quoi s'achève la leçon, tout est visiblement joie d'apprendre.

Et nous gardons de notre visite cette impression que pour une ballerine née, danser c'est se sentir vivre.

(revue l'Opéra de Paris n° 12, 1er trimestre 1956)

Exercice à la barre (Mlle Dynalix)